Extrait

8 légitimation, tel type de meuble ou tel ensemble insigne au milieu de productions contem- poraines, le mouvement s’étendant d’ailleurs, au-delà du seul XVIII e siècle, aux réalisations du Premier Empire, et Napoléon rejoignant ici Marie-Antoinette. C’est tout ceci, sans oublier le contexte plus général de l’histoire du goût et des collec- tions, en France comme à l’étranger, et notamment en Grande-Bretagne, mais aussi celui de la réalisation de nouveaux chefs-d’œuvre appelés à remplacer leurs illustres devanciers, en attendant, comme eux, de connaître éclipse et renouveau d’intérêt, qui est ici magistralement retracé par Mathieu Caron. Alliant, dans une passion communicative et une remarquable maîtrise de réflexion et d’écriture, une connaissance intime et précise des objets à celle des archives, en particulier celles du Garde-Meuble, ancêtre de notre Mobilier national, il retrace tous les épisodes, le plus souvent peu, mal ou pas du tout connus, de l’utilisation, ou non, des meubles et des objets d’art anciens – entendons antérieurs à la période étudiée –, par les souverains, leur famille ou la Cour tout au long du XIX e siècle. L’histoire de l’art rejoint ici, de toute évidence, l’histoire, le décor mobilier étant l’illustration de l’idée que veut donner de lui le pouvoir en place, sans négliger pour autant la recherche d’un confort jugé de plus en plus nécessaire au fur et à mesure que l’on avance dans le siècle (on pense ici bien entendu à Napoléon III et Eugénie qui eurent, de tous, les palais ou les résidences les plus modernes, tant pour ce qui est du goût du jour que pour les commodités de la vie quotidienne). Mais c’est une histoire de l’art qui touche tout aussi bien aux phénomènes de création et de pro- duction qu’à ceux illustrant, à tous les niveaux, la réception des œuvres d’art et, ultimement, leur entrée dans les musées. Sous cet angle, on appréciera tout particulièrement les derniers développements de Mathieu Caron, qui apportent un éclairage tout à fait nouveau sur la création du département des Objets d’art du musée du Louvre, et ce qui le lie, directement ou indirectement, aux résidences impériales ou royales des décennies antérieures. C’est au total un chapitre tout à fait neuf de l’histoire de l’art du XIX e siècle qui est ici remarquablement écrit et mis en place, ce qu’a reconnu le musée d’Orsay en décernant son prix de thèse annuel au travail de doctorat qui en était à l’origine. Il faut se réjouir qu’une publication extrêmement rapide, à peine plus d’un an après la soutenance, lui permette de trouver une large diffusion. Espérons qu’il rencontre un succès mérité, et souhaitons que son auteur continue dans la voie qu’il a ouverte et qui renouvelle profondément notre connaissance et notre appréciation d’une période riche entre toutes. Barthélémy J OBERT Professeur d’histoire de l’art moderne et contemporain à la faculté des Lettres de Sorbonne Université Ci-contre Fig. 102 [détail] Lustre néo-Renaissance, Michel-Victor Cruchet, Étienne-Germain Ingé, 1837.

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