Extrait Sport & Vie

n o 191 57 CYCLISME Le contrat de confiance Autrefois, le dopage des coureurs cyclistes s’organisait au sein même des équipes. Il semble que ce soit plus rarement le cas et que cela manigance plutôt à l’échelle individuelle, ce qui pose pro- blème aux managers. En cas d’embauche, ils aimeraient bien savoir qui est “clean” et qui ne l’est pas. Pour le savoir, ils épluchent les différents paramètres du passeport sanguin, prêtant une impor- tance particulière à ce que l’on appelle l’ ”off-score” (Hb-60 √Ret%). Notez que dans cette formule, la concentration en hémoglobine (Hb) est donnée en grammes par litre et que “Ret%” désigne le pourcentage de réticulocytes (jeunes globules rouges) sur l’en- semble des hématies. Sans dopage, cette valeur oscille entre 85 et 95. Avec dopage, elle monte nettement plus haut. La mesure permet de se faire une idée de la probité du coureur concerné. Pour les jeunes recrues, c’est plus compliqué. Le passeport san- guin n’existe pas dans la catégorie des moins de 23 ans. Lorsqu’on veut engager un jeune coureur, on doit donc réaliser une véritable enquête pour s’assurer qu’il n’a pas entamé un programme de dopage précoce, auquel cas les données de références du passeport sanguin seraient tronquées dès le départ. Prenons le cas de la pépite ukrainienne Mark Padun (ci-contre), qui vient de signer son contrat d’embauche avec l’équipe américaine Education First-Nippo dirigée par l’ancien coureur Jonathan Vaughters. Padun avait fait sensa- tion l’année dernière en remportant deux étapes de montagne lors du Critérium du Dauphiné. Beaucoup le voient déjà comme le prochain Pogacar. Il est mani- festement très fort. Mais peut-on lui faire confiance? A la fin de la saison passée, Vaughters lui a fait passer un test de VO 2 max et le résultat (85 ml d’O 2 /min.kg) a confirmé qu’il était doté d’un gros moteur. D’autant qu’il était dans une période non-compétitive et donc plus lourd d’une petite dizaine de kilos par rapport à son poids de forme de l’été (67 kilos pour 1,82 mètre). Vaughters a donc décidé de lui faire confiance. L’avenir dira s’il a eu tort ou raison. MK FRANCE L’IGF-1 enfin démasquée? Pour beaucoup d’ob- servateurs, l’explosion des performances dans les épreuves de sprint depuis une dizaine d’années est attribuable à l’usage de produits dopants de type IGF-1 et IGF-2 (IGF pour Insulin-like Growth Factor ), qui agissent comme effecteurs de l’hormone de croissance, c’est-à- dire qu’ils renforcent l’effet de cette hormone dans l’organisme. Autre avantage: ils permettent d’éviter les réactions souvent erra- tiques de l’ancien mode de dopage. On parle en effet de l’hormone de croissance (GH) comme si elle était une et indivisible. Mais pas du tout! Cette hormone existe sous divers isoformes qui peuvent être favorables à l’effort ou pénalisants. Dans le jargon des spor- tifs, l’expression “blocatos” traduit la situation de ces athlètes qui se trouvaient bloqués par un produit censé leur donner des ailes. Par comparaison, les IGF-1 et IGF-2 ne réservent pas de mau- vaises surprises. De plus, elles sont pratiquement indétectables aux contrôles. On comprend mieux pourquoi elles constituent la hantise des responsables de la lutte antidopage. Heureusement, il semble que, grâce au travail du docteur Cynthia Mongongu (labo- ratoire de Châtenay-Malabry), de nouveaux tests puissent être bientôt mis au point. Cette chercheuse française a démontré en effet que la chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse haute résolution permettait de détecter les trois prin- cipaux analogues d’IGF-1 sur une matrice de sang séché, selon la méthode dite du Dried Blood Spot (DBS). Sur la fenêtre précise de détection, elle préfère rester évasive pour ne pas renseigner les tricheurs. Disons que cela va de quelques heures à quelques jours, voire une semaine dans le meilleur des cas. La méthode doit maintenant être validée par l’AMA. Le cas échéant, ces nouveaux tests marqueront peut-être la fin d’une époque, comme le firent il y a vingt ans les premiers tests urinaires pour dépister l’EPO. Encore une invention française! MK FOOTBALL Les épouses alibis Parmi les excuses les plus inattendues pour se dédouaner d’ac- cusations de dopage, il faut réserver une place de choix à celles imaginées par ces trois footballeurs qui ont rejeté la faute sur leurs épouses. L’attaquant italien Marco Borriello inaugure le filon en 2007 lorsqu’il explique que son contrôle positif est probable- ment dû à une pommade à base de cortisone prise par sa femme pour soigner un problème d’infection vaginale. L’explication plaît aux jurés fédéraux et Borriello ne sera suspendu que six mois. En mars 2011, l’Ivoirien Kolo Touré est pincé pour usage d’un stimu- lant spécifié (peut-être la méthylhexanamine). Il incrimine alors un complément alimentaire de type “brûleur de graisse” acheté par sa femme et qu’il aurait consommé par erreur. Là encore, il éco- pera d’une suspension réduite à six mois. Le dernier exemple est plus récent. Il concerne le gardien de but de l’Ajax Amsterdam, le Camerounais André Onana, positif à un puissant diurétique (furo- sémide) lors d’un test inopiné du 30 octobre. Son explication? Il aurait confondu la boîte de Lasimac destinée à sa compagne avec le Litacold (une copie du fameux Actifed rhume) qu’il prenait lui-même pour soigner un refroidissement. Là encore, cela a suffi pour passer de la sanction de deux ans de suspension prévus par le code à neuf mois seulement. Bref, ces joueurs sont chaque fois parvenus à obtenir un rabais. Alors, pourquoi se gêner? MK André Onana se trompe de boîte.

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