Extrait L'Objet d'Art

LA CONSTRUCTION DU « TEMPLE DE L’ABONDANCE » La mort du prince, en 1741, ouvre des perspectives. On envisage d’utiliser ce vaste terrain pour édifier la nouvelle Halle au blé dont la capitale a tant besoin, ainsi que des immeubles loca- tifs. Cela permettrait la construction ex nihilo d’un bâtiment à la pointe de la modernité, tout en maintenant le commerce des grains et des farines au cœur de Paris. L’hôtel est détruit en 1748 ; la colonne de Catherine de Médicis est sauvée de justesse, achetée par l’écrivain Louis Petit de Bachaumont, qui en fait par la suite don à la Ville. Après des années d’une spé- culation hasardeuse, le roi autorise les travaux en 1762. Ils sont confiés à Nicolas Le Camus de Mézières, dont c’est la première réalisation d’importance. Le parti retenu pour l’édifice lui-même et pour son implantation prouve toute l’habileté de l’architecte. En dessinant un bâtiment annulaire pourvu d’une galerie couverte surmontée d’un gre- nier et entourant un espace central à l’air libre, Le Camus de Mézières exploite au mieux la forme de pentagone irrégulier de la parcelle et réussit à concilier les deux types de halles – couvert ou découvert – mis en œuvre jusqu’à présent. Le plan circulaire ne se justifie toutefois pas uniquement par des impératifs fonctionnels. L’architecte est, en e"et, attentif aux sensations, aux impressions produites par son édifice. La Halle au blé doit donc, par son apparence même, refléter sa fonction de « temple de l’Abondance ». Il accorde ainsi une attention toute particulière à l’élévation du bâtiment, sobre- ment scandée de pilastres toscans colossaux. La silhouette de l’édifice rappelle par ailleurs le Colisée de Rome, une référence qui n’est bien évidemment pas fortuite à une époque où l’art gréco-romain est érigé en modèle absolu. Tout cela concourt à donner à la Halle au blé la majesté nécessaire. Claude Poulleau (graveur), d’après Nicolas Le Camus de Mézières, Plan des Halles couvertes et incombustibles pratiquées pour les grains, farines et grenailles, en l’emplacement de l’ancien hôtel de Soissons, quartier de Saint-Eustache , vers 1765 Eau-forte, 62,2 x 47 cm. Paris, musée Carnavalet – Histoire de Paris. Photo CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet – Histoire de Paris Nicolas Le Camus de Mézières, Coupe de l’escalier à double révolution prolongée , vers 1820. Plume et lavis, 62,5 x 49 cm. Paris, École nationale supérieure des beaux-arts – ENSBA © Beaux-Arts de Paris, dist. RMN / image Beaux-Arts de Paris 10 L’OBJET D’ART HORS - SÉRIE BOURSE DE COMMERCE DE L’HÔTEL DE SOISSONS À LA HALLE AU BLÉ

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