Extrait L'Objet d'Art

22 L’OBJET D’ART JUIN 2021 Rêves d’Orient à Fontainebleau Transcrire la poésie en peinture Sur lamoitié gauche du paravent, dans un pay- sage enneigé, se détache un noble cavalier, sui- vi de quatre personnages à pied. Il s’agit d’une représentation de la Passe de Sano, un site cé- lébré par la poésie japonaise dès le VIII e siècle et consacré par Fujiwara no Teika (1162-1241). Grâce à un habile contraste entre les couleurs mates et la brillance de l’or aux textures va- riées, le peintre réussit à transcrire le geste élégant du cavalier et l’atmosphère feutrée évoqués par le poète. Les contours flottants de l’image lui confèrent un aspect presque irréel.  Kanô Shuntei Fusanobu (?-1868), La Passe de Sano. Paravent à six feuilles, envoi de 1860. Couleurs et feuilles d’or sur papier, encadrement en bois laqué, bronze ciselé et doré, 175 x 382,8 cm. © RMN-Grand Palais (château de Fontainebleau) / Gérard Blot L es objets japonais conservés dans les collections du château de Fontainebleau constituent la trace tangible d’un épisode majeur de l’histoire de l’Empire du Soleil-Levant, qui s’ouvre alors à l’étranger après une longue période de politique isola- tionniste. L’arrivée du commodore Perry dans la baie de Tokyo en 1853 entraîne en effet la naissance de relations diplomatiques avec l’Occident. Un traité d’amitié et de commerce est établi avec la France dès 1858, et dans les années 1860, pas moins de quatre délégations japo- naises sont accueillies à la cour de Napoléon III et d’Eugénie. Lors de ces visites, les souverains français reçoivent de nombreux cadeaux de prix, extrêmement raffinés : céramiques, laques, peintures, mais aussi armures, tissus, etc. En 1865, un certain nombre de ces objets rejoignent le château de Fontainebleau et quelques-uns sont présentés dans leMusée chinois et le Salon des laques de l’Impératrice, où il est encore possible de les admirer aujourd’hui. Ils témoignent ainsi du goût per- sonnel d’Eugénie pour l’Extrême-Orient, peu de temps avant que le japonisme ne déferle sur la France. Camille Jolin À LIRE : Art et diplomatie. Les œuvres japonaises du château de Fontainebleau (1862-1864) , éditions Faton, 128 p., 19 € . À commander sur www.faton.fr PORTFOLIO

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