Extrait L'Objet d'Art

5 NOVEMBRE 2019 L’OBJET D’ART par Dresde et Minorque, mais les temps sont difficiles. Le couple se sépare et la guerre vient bientôt freiner les recherches de Hartung. Après les tourments de la guerre pourtant, ses peintures traduisent l’épanouissement de son style. Exposé partout dans lemonde, soutenu par des galeristes et des critiques, il est reconnu comme un précurseur de l’abstraction lyrique (courant aux contours flous qui réunira Georges Mathieu ou Pierre Soulages). Apaisé par la reconnaissance enfin ac- quise et par ses retrouvailles avec Anna-Eva qu’il épouse à nouveau en 1957, Hartung parvient à un équilibre subtil entre les lignes et les taches, entre le noir et les couleurs. Gratter, souffler, racler Salle après salle, série après série, le visiteur découvre avec bonheur les inlassables recherchesmenées par l’artiste. « Avant 1960, souligne la commissaire de l’exposition Odile Burluraux, il ne fait jamais rien librement sur la toile, tout est reporté au carreau et agrandi à partir de dessins. C’est là que se trouve le geste spontané. » Après cette date au contraire, il s’attaque directement à la toile de grand format et délaisse les pinceaux au profit d’outils volontiers insolites (on trouve dans son atelier des balais, des outils de jardinage détournés, des pin- ceaux multi-têtes bricolés, des pistolets à air comprimé...). L’emploi de couleurs acryliques et vinyliques aux teintes vives et qui sèchent très vite contribue à transformer en profondeur sa manière de travailler, tandis que pour pallier son handicap physique, il s’entoure d’assistants. Cetteamplesélectiondepeintures, ponctuéededessins, dedocuments « Hans Hartung. La fabrique du geste », jusqu’au 1 er mars 2020 au Musée d’Art Moderne de Paris, 11 avenue du Président-Wilson, 75116 Paris. Tél. 01 53 67 40 00. www.mam.paris.fr Catalogue, Musée d’Art Moderne de Paris / ParisMusées, 272 p., 44,90 € . À LIRE : L’Objet d’Art hors-série n°141, 64 p., 9,50 € . À commander sur www.faton.fr d’époque et de vidéos, dévoile aussi un florilège de gravures et de photographies de Hartung. Précisons qu’il a « la manie de tout photo- graphier » depuis l’enfance (la Fondation Hartung-Bergman conserve 15 000 clichés !) et qu’il a seulement 17 ans lorsqu’il réalise sa pre- mière gravure. Ces médiums ont eu un impact décisif sur son œuvre peint. Au sujet de la lithographie l’artiste confie ainsi : « ellem’a inspiré des constructionsmassives et m’a libéré de la dépendance du trait qui m’a été coutumier presque toute ma vie ». L’atelier d’Antibes Le Musée d’Art Moderne réunit une remarquable sélection d’œuvres des années 1970 et 1980, relativement peu exposéesmais d’une puis- sance et d’une vitalité étourdissantes. «Depuis 1970, affirme Hartung, j’ai le sentiment d’un renouveau. Comme une nouvelle force, une nou- velle jeunesse qui me sont accordées. » Dans une œuvre comme T1973-E12 , il conjugue le noir aux couleurs vives, et il mêle avec brio différentes techniques afin de varier les effets (pinceaux, pistolets à air comprimé, rouleaux encreurs de lithographes). L’installation dans la maison-atelier qu’il a fait construire sur les hauteurs d’Antibes n’est pas étrangère à cette renaissance. Désormais, l’artiste ne se limite plus dans les formats et il travaille à un rythme soutenu, réalisant parfois jusqu’à huit tableaux par jour ! Le parcours se clôt avec une dizaine de grandes acryliques réalisées au pistolet airless et à la sulfateuse l’année même de sa mort, survenue le 7 décembre 1989, quelques semaines après la chute du mur de Berlin. L’atelier d’Antibes abrite aujourd’hui la Fondation Hartung-Bergman, qui promeut activement le travail de ce couple emblématique de l’art du XX e siècle, en s’appuyant sur l’exceptionnel fonds d’œuvres et d’archives constitué par les deux artistes. Lamajorité des peintures exposées au MAM ont d’ailleurs été prêtées par la Fondation. MyriamEscard-Bugat T1962-U8 , 1962. Peinture vinylique sur toile, 180 x 142 cm. Antibes, Fondation Hartung-Bergman. Photo service de presse. © Adagp, Paris, 2019. Photo : Fondation Hartung-Bergman François Walch, Hans Hartung dans son atelier d’Antibes , 1975. Photo service de presse. © Adagp, Paris 2019. Photo : François Walch

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