Extrait L'Objet d'Art

62 L’OBJET D’ART OCTOBRE 2019 LE JEU DES RENCONTRES L’émergence de l’œuvre « des » Lalanne, ainsi qu’il est convenu d’appeler leur travail commun, semble née du hasard. Si l’un et l’autre ont une formation artistique, François-Xavier est au départ un peintre oscillant entre abstraction et figuration, auteur de toiles aux tons aus- tères, qui vit difficilement de son travail, même s’il a pu nouer de solides amitiés avec des sculpteurs comme Brancusi, Tinguely ou Spoerri, ses voisins dans la cité d’artistes de l’impasse Ronsin à Montparnasse, ce der- nier devenant un des membres du Nouveau Réalisme. Un événement aura a posteriori une conséquence im- portante : à l’âge de 21 ans, en 1948, il épouse briève- ment Eugénie Pompon, parente éloignée du sculpteur animalier de style Art déco, dont il saura se souvenir. C’est lors du vernissage de sa première exposition à la galerie Cimaise quatre ans plus tard qu’il fait la connais- sance de celle qui deviendra son épouse en 1962, Claude. De deux ans son aînée, celle-ci prépare l’École nationale supérieure des arts décoratifs, avant d’être Les LALANNE À la fois héritiers d’une tradition de la sculpture animalière et auteurs d’un œuvre à succès fondé sur la fonction, François-Xavier et Claude Lalanne manifestent une créativité débridée, sans cesse renouvelée, qui doit beaucoup à un jeu de rencontres. À l’occasion de la dispersion chez Sotheby’s des œuvres qu'ils avaient réunies dans leur maison- atelier près de Fontainebleau, L'Objet d'Art revient sur l’œuvre poétique et plein d’humour de ce couple d’artistes inclassables. / Par Stéphane Laurent, directeur de la Spécialité Arts décoratifs, mode et design à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne étudiante en architecture à l’École des beaux-arts. En cette époque prospère d’équipement de la France, François-Xavier décide de s’orienter lui aussi vers la voie plus lucrative de lamaîtrise d’œuvre et de la décoration. En cela, l’année 1956 est un basculement : non seule- ment le couple travaille pour la première fois ensemble mais, outre des décors pour le cinéma et le théâtre, une de ses tâches consiste à réaliser des vitrines pour Christian Dior, que supervise son jeune assistant, un certain Yves Saint Laurent. Or cette rencontre s’avère décisive puisque ce dernier leur commandera tout un ensemble de meubles ainsi que des empreintes corpo- relles en cuivre pour sa collection automne-hiver 1969- 1970, contribuant par là même à les faire entrer dans une certainemondanité internationale, à la hauteur d’un Emilio Terry. Viendront ainsi des expositions dans des hauts-lieux du patrimoine, des clients huppés comme Guy et Marie-Hélène de Rothschild ou Serge Gainsbourg À l’intérieur de leur maison-atelier d’Ury, près de la forêt de Fontainebleau, les Lalanne se sont entourés de leurs propres œuvres. © Capucine de Chabaneix pour Sotheby’s artistes de l’objet PORTRAIT

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