Extrait Dossier de l'Art

ENTRETIEN Cette longue maturation picturale n’est pas pratiquée d’emblée par Léonard. Selon vous, une première période s’amorce dans l’atelier de Verrocchio. Qu’apprend Léonard auprès de lui ? LF Dans ce grand atelier de sculp- ture, Léonard apprend à maîtriser les formes comme un artiste du Quattrocento. Ses premières pein- tures, l’ Annonciation , la Madone à l’œillet et la Ginevra de’ Benci , relèvent de cet univers de formes parfaites et closes. Parallèlement s’amorce la focalisation sur l’ombre et la lumière, qui sera l’une des nou- veautés de la peinture de Léonard : elles deviennent chez lui le matériau même de l’espace. On peut voir là une étape essentielle de son passage de l’univers de la sculpture à celui de la peinture. Léonard est probablement entré dans l’atelier de Verrocchio dès 1464. À cette époque, Verrocchio est beaucoup plus sculpteur que peintre. Si Léonard perfectionne sa peinture en étudiant les Pollaiuolo ou la pein- ture flamande, son passage chez Verrocchio a dû être déterminant aussi de ce point de vue. On pour- rait dire que Verrocchio est un sculp- teur peintre comme Léonard sera un peintre sculpteur. A-t-il participé à L’Incrédulité de saint Thomas de Verrocchio, présen- tée au début de l’exposition ? VD Nous en sommes intimement convaincus. Léonard est probable- ment resté dans l’atelier deVerrocchio de 1464 à 1482 : non seulement il a mis la main à cette sculpture, mais il en est né. Les dessins de Verrocchio ont également été très importants pour lui. Les deux artistes, aux per- sonnalités très proches, avaient sans doute beaucoup d’intérêts communs. avant 1503. Ainsi réunis, documents d’archives, études en laboratoire du tableau et des dessins, et enfin étude des copies permettent de reconsti- tuer ce qu’on percevait comme des aller-retours obscurs dans l’icono- graphie de la Sainte Anne . Ce qui en ressort est finalement très simple et correspond à l’évolution spirituelle de l’image que Léonard a voulu créer – cette évolution qui donne au tableau sa force singulière. n’emploie pas les mêmes techniques selon les différentes phases d’éla- boration, d’où l’intérêt de classer par technique la dizaine de feuilles préparatoires conservées. Ce simple classement donne déjà les grandes étapes. Les dessins à la sanguine (qui datent plutôt de la fin du XV e siècle ou du début du XVI e ) sont prépa- ratoires au carton, donc au premier dessin posé par Léonard. En revanche, les dessins beaucoup plus com- plexes, datés des années 1508-1510, renouvellent le carton initial exécuté juste Q Andrea del Verrocchio, Le Christ et saint Thomas ou L’Incrédulité de saint Thomas , 1467-83. Bronze aux inscriptions dorées, H. 230 cm. Florence, Chiesa e Museo di Orsanmichele. Photo service de presse © L. Frank

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