Extrait Art et Métiers du Livre

AML N° 342 5 La princesse Palatine L’exposition nous offre un véritable voyage dans l’univers du Grand Siècle à travers une centaine de peintures, gravures, dessins, photographies, tapisseries, objets d’art et lettres manuscrites. Devenue « Madame » à la cour de Louis XIV, la fille de l’Élec- teur palatin Karl-Ludwig – qui espère, à tort, par cette alliance obtenir la protection du monarque contre ses voisins – s’ennuie. Elle se consacre alors à une correspondance très abondante avec sa famille allemande pour tenter de rompre l’éloignement et le déracinement. On dénombre plus de 60 000 missives dont un dixième est conservé aujourd’hui.« Je ne possède pas l’art de dire beaucoup en peu de mots,et c’est pour cela que je fais mes lettres si longues », écrit- elle. Certaines font en effet 20 à 30 pages ! Ce précieux héritage,qui nous renseigne avec une étonnante fraî- cheur sur le caractère de la dame et les mœurs de son temps, sert de fil conducteur à l’exposition. Les por- traits de ses contemporains, qu’elle décrit avec verve et ironie – Madame de Maintenon y essuie des « guenon » et « vieille ordure » ! –, ponctuent le parcours. L’ensemble de son courrier se caractérise par une réelle liberté intellectuelle et une culture huma- niste, et constitue une source d’infor- mations irremplaçable sur le règne de Louis XIV. Outre ce talent pour l’art épistolaire, la Palatine possède de nombreuses autres passions comme les médailles et pierres gravées et les relations de voyage dont sa biblio- thèque comporte une belle sélection. Elle a réuni l’une des plus importantes collections de gemmes de son époque (aujourd’hui conservée au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg) et d’autres objets, tels des microscopes, décrits dans son testament après décès,attestent aussi son intérêt pour les sciences. Ce n’est pas un hasard si le musée des Avelines a souhaité mettre en lumière cette princesse un peu oubliée – bien que fort média- tique en son temps : elle appréciait grandement le château que le roi avait acheté pour son frère en 1658 à Saint-Cloud : « […] c’est un lieu que j’aime et que je prise, car c’est le plus bel endroit du monde », écrit-elle en 1715. Le site, surplombant la Seine, évoquait sans doute pour elle le pay- sage fluvial de Heidelberg, capitale du Palatinat (l’un des sept électorats du Saint-Empire romain germanique) où elle passa son enfance… S. D.-G. La princesse Palatine (1652-1722). La plume et le Soleil, jusqu’au 28 février 2021, musée des Avelines, 60, rue Gounod, 92210 Saint-Cloud. Du mercredi au samedi de 12h à 18h, dimanche de 14h à 18h. Tél. : 01 46 02 67 18, site Internet : musee-saintcloud.fr. Catalogue, édition musée des Avelines, 224 p., 22 €. Élisabeth-Charlotte de Bavière, qui épouse en 1671 Philippe d’Orléans, le frère de Louis XIV, est une figure peu connue de l’histoire de France. Le musée des Avelines, à Saint- Cloud, remet sur le devant de la scène cette étonnante princesse témoin privilégié du règne du Roi-Soleil. De haut en bas : Lettre de la Palatine à sa demi-sœur la comtesse Louise, Marly, le 21 mai 1715, collection P. Heinstein. © DR. Vue générale du château de Saint-Cloud attribuée à Adam Pérelle, gravure en creux rehaussée de gouache, 1680, Saint-Cloud, musée des Avelines. ©Ville de Saint-Cloud – musée des Avelines / A. Bonnet.

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