Extrait Archéologia

26 / ARCHÉOLOGIA N° 574 EN HAUT. Cuillères découvertes sur l’île de Tromelin. © Jacques Kuyten Objet retrouvé sur l’île de Tromelin. Les objets utilisés pour la vie courante proviennent en majorité de l’épave de l’Utile . Ils furent utilisés tels quels ou après transformation. © J. Kuyten Archéologie de l’invisible Les quelques campagnes de fouilles archéo- logiques avaient pour objectif de com- prendre la vie quotidienne des naufragés et comment ils s’étaient organisés socialement et technologiquement pour survivre. Lors de la première mission, le four, construit par les Français afin de cuire des biscuits pour se nourrir durant leur périple de retour, fut vite découvert. En revanche, aucune trace du puits qu’ils creusèrent et qui continua à être utilisé après leur départ. Les traces des esclaves abandonnés furent, elles, encore plus discrètes : pipe en terre cuite et garde d’épée récupérée de l’épave. Après beau- coup de patience, furent enfin repérées les ruines de murs en blocs de corail assemblés sans mortier, restes des abris sommaires construits par les naufragés après le départ des Français. Le second séjour révéla plus de vestiges. Néanmoins, l’échantillon se résume à peu de choses, reflétant par là-même la misère dans laquelle les Malgaches survécurent. Des bases de murs, des ossements des rares ani- maux consommés et des outils de fortune constituèrent l’essentiel du mobilier archéo- logique retrouvé. Les pièces de métal du navire échoué avaient été ramassées pour être transformées en outils : un gond devint marteau, des pentures de porte se muèrent en haches, etc. Pour ce faire, les Malgaches, traditionnellement métallurgistes de talent, réactivèrent sans doute la forge construite par les Français après le naufrage. Sur envi- ron 1##600 vestiges récoltés, la plupart en piteux état, rares sont ceux présentables. C’est donc avec pratiquement rien qu’il fal- lut inventer une exposition. C’est peut-être là le plus beau coup de génie qu’eurent les concepteurs en créant une passionnante visite de ce drame humain et de sa mise au jour par les archéologues. Il n’y a presque rien d’exposé, et pourtant on comprend tout. Comme quoi, ne faire rien mène le plus sou- vent à faire bien. Le coup de génie des concepteurs de l’exposition est d’avoir réussi à créer, avec presque rien, une passionnante visite de ce drame humain et de sa mise au jour par les archéologues.

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