Extrait Dossier de l'Art

DOSSIER DE L’ART 266 / 9 ENTRETIEN AVEC LES COMMISSAIRES DE L’EXPOSITION critique, ressemble à une petite jeune fille du XVIII e siècle. On commence à percevoir l’aspect contemporain des figures. A. C. : L’évolution des idées fait que, contrairement au XVII e siècle qui était assez méfiant à l’égard de ce qui ne relevait pas de la raison, le XVIII e considère d’un œil assez favorable le sentiment. Les peintres peuvent désormais s’appuyer sur ces senti- ments, les utiliser comme un miroir tendu au spectateur. Parce qu’ils s’ef- forcent de toucher le cœur en pre- mier, leur peinture devient plus spec- taculaire, plus théâtrale. Jean Jacques Lagrenée, La Chute des idoles et le repos pendant la Fuite en Égypte , vers 1775. Huile sur toile, 89 x 117 cm. Rennes, musée des Beaux-Arts Photo service de presse © MBA Rennes d’artiste de cette envergure pour le XVI e siècle, contrairement à l’Italie. Les contemporains espèrent donc que la suite sera à la hauteur, et je crois qu’il y a une déception à voir que le XVIII e n’arrive pas à rivaliser sur ce terrain avec le siècle précé- dent. En raison de ces liens per- manents avec le XVII e il est donc malaisé de discerner ce qui fait la spécificité des tableaux d’histoire du XVIII e siècle.Il y a cependant un esprit, une manière de peindre plus libres, et puis quelque chose de peut-être plus sentimental : au XVII e siècle, l’expres- sion des passions est assez retenue parce qu’elle est très codifiée, sous l’autorité des dessins de Le Brun. Le XVIII e siècle est moins strict. Certes, un peintre comme Vanloo reste attaché à la tradition, mais sa sainte Clotilde (p. 18), comme le souligne la tement de tout sujet, que la moder- nité est la plus grande. La boucle est bouclée... Seul compte à présent ce rapport direct au spectateur, l’appel à son regard, son goût, sa sensibi- lité. Diderot, critique irréductible et magnifique, pourtant si habile littéra- teur, en perd son latin ! Quant à la peinture d’histoire que vous allez montrer à Rennes, en quoi est-elle du XVIII e siècle ? G. K. : On saisit assez facilement en quoi elle prolonge celle du siècle pré- cédent, car les modèles des peintres d’histoire demeurent Rubens, Le Brun, Le Sueur, y compris pour ceux qui en prennent le contrepied. En outre, les grands peintres d’his- toire français du XVII e siècle sont en ce domaine les premières grandes gloires de la France, qui n’a pas

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