Extrait Art et Métiers du Livre

4 AML N° 330 L’ A C T U A L I T É d es expositions La collaboration artistique d’Érik Desmazières avec l’imprimeur René Tazé constitue le fil conducteur de cette exposition. 40 ans de complicité sont ainsi illustrés par des gravures et des dessins qui restituent les ateliers successifs du taille-doucier à partir de 1978, leur atmosphère et la qualité du travail accompli. La collaboration d’un artiste graveur avec son imprimeur est importante, l’enjeu est de taille : l’application des encres, l’essuyage de la plaque, le traite- ment du papier, la force donnée à la presse sont quelques-uns des para- mètres qui interviennent dans le rendu final et les mille nuances possibles.Celle d’Érik Desmazières et de RenéTazé est de l’ordre de la complicité fructueuse. « Au fur et à mesure de l’évolution de mon travail, René aura toujours les bonnes réponses aux problèmes qui se posent », confie l’artiste. Érik Desmazières se forme à la gravure en suivant les cours du soir de la Ville de Paris dispensés par Jean Delpech, grand prix de Rome en 1948. Il y ren- contre Philippe Mohlitz,Yves Doaré ou encore François Houtin. En 1972, lors- qu’il commence à se sentir assez assuré, il se rend chez le fameux imprimeur Georges Leblanc, rue Saint-Jacques, pour faire tirer l’un de ses premiers cuivres.C’est RenéTazé,entré officielle- ment à l’atelier dès ses 16 ans, qui s’ac- quitte de la tâche,« brillamment » dira le jeune homme, alors âgé de 24 ans. Le taille-doucier travaille ensuite chez les frères Crommelynck, les célèbres imprimeurs, entre autres, de Picasso, où il apprend à connaître l’aquatinte, avant d’ouvrir son propre atelier rue Hittorf, dans le 10 e arrondissement de Paris. L’endroit est « […] pittoresque, avec sa verrière, ses cloisonnements intérieurs vitrés et bien sûr ses belles machines. C’est un lieu que je fréquente désor- mais assidûment. J’y viens pour faire faire des essais, des états des gravures en cours et c’est comme cela que tout naturellement m’est venue l’envie de le représenter », explique Érik Desma- zières. « Ne vivant et ne travaillant pas dans un endroit me permettant d’avoir des presses, il y aura continuellement des allées et venues entre chez moi, où je grave et fais les morsures à l’acide sur Érik Desmazières graveur, René Tazé imprimeur les plaques,et l’atelier de la rue Hittorf.» À partir de 1978, il en montre, sous des angles variés, par le dessin et la gravure, les différents espaces et les machines, synonymes d’œuvres en devenir grâce au savoir-faire de RenéTazé,à sa compré- hension des attentes du graveur et au talent de ce dernier. Il faut savoir que durant 40 ans sortent ainsi de ses presses environ 30 000 feuilles corres- pondant à près de 200 gravures. L’ar- tiste poursuivra cette démarche à la fois descriptive et interprétative au gré des déménagements successifs de l’impri- meur jusqu’à la villa du Lavoir, à proxi- mité de la porte Saint-Martin. Évoquant la vie de l’atelier, les œuvres exposées sont la mémoire des lieux où a travaillé René Tazé restitués par l’œil et la vir- tuosité d’Érik Desmazières. Marie Akar De haut en bas : Atelier René Tazé V , 1992-2018, eau-forte avec roulette et aquatinte, épreuve sur vélin Fabriano Tiepolo rehaussée de gouache, 65,8 x 50,5 cm [76 x 56 cm]. © Raphaël Caussimon. Atelier René Tazé, villa du Lavoir , 2018, eau-forte avec roulette et pointe-sèche, épreuve du 5 e état sur vergé mince Bugra gris appliqué sur vélin BFK Rives, rehaussée de gouache et d’aquarelle, 47,7 x 71,5 cm [60,5 x 80 cm]. © Raphaël Caussimon.

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