Extrait

plus grand réalisme au détriment, selon Abel Faure, des « effets prodigieux de Rembrandt 21 ». Aussi, malgré l’admiration qu’éprouvait Desboutin pour l’artiste formidable de La Pièce de cent florins , il prit ses distances avec lui et fut capable de l’interpréter plus que de l’imiter servilement. C’est sans doute par cette capacité à décortiquer le style de Rembrandt et à n’en retenir que les constituantes nécessaires à son propre œuvre, que Desboutin réalisa si peu de gra- vures de reproduction de son mentor spiri- tuel. Il faut aussi souligner qu’il admirait, largement, les maîtres anciens, autant fla- mands, espagnols qu’italiens, et qu’en dépit de sa prééminence, Rembrandt ne fut pas l’objet de toute son attention. La collection de l’artiste à l’Ombrellino, riche de Véronèse, de Titien, de Tintoret, de Rubens, de Luca Giordano 22 , parmi d’autres, révèle, chez Deboutin, l’étendue et la diversité de son intérêt pour tous les mouvements artis- tiques, tous les styles et, forcément, des confrontations esthétiques dans son œuvre qui témoignent de cet éclectisme. De la même manière, Desboutin partageait avec Rembrandt une admiration commune pour les clairs-obscurs et l’anti-idéalisme du Caravage. Cette fascination a pu aussi bien inspirer l’un que l’autre et les mener à des recherches personnelles approchantes. 134. Autoportrait , non daté, huile sur carton, 30 × 25 cm, Évreux, musée d’Évreux, 8664 (achat, 1964). Notes 1. Silvestre, 1891, p. 38. 2. Voir sur ce sujet McQueen, 2003. 3. Voir p. 26. 4. Si elles ne furent exposées qu’en 1869, les gravures datent de 1862. 5. Clément-Janin, 1922, p. 200. 6. The Art Collector , 1891, p. 116. 7. Une transcription de l’acte notarié daté de 1859 et fait à Florence, mentionnant l’état de la fortune de Desboutin et de sa collection d’œuvres d’art, est conservée dans les archives Marcellin Desboutin du musée Anne- de-Beaujeu de Moulins. L’œuvre de Rembrandt, référencée sous le n o 31, n’a pas pu être identifiée. 8. Clément-Janin écrivait notamment qu’en matière de jeux d’ombres et de lumière, Desboutin s’inscrivait dans « un effet à la Rembrandt dont la tradition n’appartient actuellement qu’à lui ». Clément-Janin, 1922, p. 154. 9. Crépin-Leblond, 1902, p. 131. 10. Lafenestre, 1902b, p. 12. 11. Alvin, 1855, p. 222. 12. Couture, 1868, p. 225. 13. Clément-Janin, 1922, p. 207. 14. « Il est évident que, par cette définition même, Desboutin prouve qu’il est plus dessinateur et graveur que peintre. Ce qui les distingue, en effet, c’est que le peintre joue de tons colorés, en sus des valeurs de clair- obscur, tandis que le graveur ne dispose que de ces dernières. » Ibid . 15. Crépin-Leblond, 1902, p. 136. 16. Clément-Janin, 1922, p. 154. 17. Lorquet, 1901, p. 224. 18. E. Delaigue caractérisait par exemple toutes les scènes de vie familiale que peignit Desboutin « d’esquisses peintes ». Il n’était pas rare qu’il les enlève, en effet, en quelques heures seulement. Delaigue, 1890, p. 296. 19. Barrès, 1929, p. 257. 20. Faure, 1923, p. 382. 21. Ibid . 22. Voir note 4.

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