Extrait

335 Le musée d’un vagabond Capitaine de vaisseau dans la Marine natio- nale et célèbre écrivain, Julien Viaud (1850- 1923), le futur Pierre Loti (fig. 1-2), a parcouru le monde entre 1869 et 1913. Il tire de ses voyages, compulsés dans un journal intime tenu pendant cinquante ans, la matière qui fera le succès de ses romans. Ses séjours au pays du Soleil-Levant lui permet- tront ainsi d’écrire Madame Chrysanthème (paru en 1887), Japonerie d’automne (1889), Escales au Japon (1902) et enfin La troisième jeunesse de madame Prune (1905). Entre deux déplacements à l’étranger, et pendant près de vingt-cinq ans, Loti va aussi aménager sa maison natale en un « musée » sentimental, dans lequel il rassemble tous les objets amassés lors de chacune de ses pérégrinations. Ainsi, du Japon qu’il visite pour la première fois en 1885, Loti rapporte assez de maté- riaux pour construire sa « pagode japonaise » (fig. 2-3), sorte de remise remplie de bibelots, qu’il aménage dès 1886. Loti n’en est alors pas à son coup d’essai. Déjà, dès les années 1870, il avait décoré la chambre de son défunt frère (Gustave, mort en mer en 1865) avec les objets qu’il avait rapportés de son voyage dans le Pacifique (1871-1872). Puis, ce fut l’aménagement d’une chambre turque (1876-1877), du salon rouge (1885) et de la chambre aux abeilles (1886). Avec la construction de la salle gothique (1887), un autre cycle va parallèlement se mettre en place, celui des fêtes d’inauguration des nouvelles pièces ; les « vernissages » du « musée » Loti venaient de naître. Ce dernier organise donc en 1888, dans la salle néogo- thique, un dîner Louis XI dont la presse se fera écho ( Le Monde illustré du 21 avril 1888 : « Un festin Louis XI, chez M. et M me Pierre Loti »). Cette fête mondaine thématique fera florès et par la suite seront organisés une fête arabe pour le salon turc (1889), une fête sain- tongeaise pour la salle paysanne (1894), ou encore une fête sino-japonaise (1903) pour la salle chinoise (achevée en 1902) 1 . PIERRE LOTI La pagode japonaise Romain B ILLON Page de gauche Fig. 1. Dornac, Pierre Loti dans sa pagode japonaise. Rochefort, maison de Pierre Loti. © Musées municipaux, Rochefort. Fig. 2. Portrait de Pierre Loti. Nos contemporains chez eux , Dornac, 1887- 1917. Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie, 4-NA-102 (2). © BnF.

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