Extrait Virgule

JULIE – Monsieur de La Fontaine, pouvez-vous nous parler de votre enfance ? JEAN DE LA FONTAINE – Elle remonte à plusieurs siècles ! Je suis né le 8 juillet 1621 à Château-Thierry (au nord-est de Paris), où mon père était maître des eaux et des forêts et maître des chasses. Grâce à lui, j’ai passé beaucoup de temps à arpenter la campagne. Je l’accompagnais dans ses tournées d’inspection : un maître des eaux et des forêts contrôlait l’entretien des bois, des forêts, des rivières et des étangs, mais aussi celui des fossés, des bornes et des chemins. Mon père était également chargé de surveiller les gardes et les bûcherons, la chasse et la pêche. Et moi, j’avais tout le loisir d’observer les animaux ! ELLIOT – Vous n’alliez pas à l’école, alors ? JEAN DE LA FONTAINE – Bien sûr que si ! Mes parents m’ont inscrit au collège de Château-Thierry. C’est là que j’ai découvert les auteurs grecs et latins de l’Antiquité. J’aimais beaucoup Virgile, un poète du I er siècle avant J.-C. : j’ai dévoré ses Bucoliques et ses Géorgiques , des recueils qui célèbrent la nature. C’est au collège que j’ai rencontré mon ami François de Mau- croix, avec lequel je suis resté très lié jusqu’à ma mort. JULIE – Vous êtes ensuite devenu écrivain ? JEAN DE LA FONTAINE – Pas du tout ! Je suis allé à Paris pour mes études. Au début je pensais deve- nir prêtre et finalement j’ai étudié le droit. En 1649, j’ai obtenu le titre d’avocat. ELLIOT – Vous vous êtes marié après avoir obtenu votre diplôme ? JEAN DE LA FONTAINE – En réalité, je me suis marié avant ! Mes parents et ceux de mon épouse avaient arrangé ce mariage, à Château-Thierry. Ma famille avait des dettes, la famille Héricart était riche, alors j’ai épousé leur fille Marie, qui n’avait que quatorze ans. Moi, j’avais douze ans de plus qu’elle, mais on ne se souciait guère de cela en 1647. Cinq ans plus tard, nous avons eu un fils, Charles... Je dois avouer que je n’étais pas un très bon mari, je passais beaucoup de temps à Paris, à fréquenter les milieux littéraires. JULIE – Comment viviez-vous ? JEAN DE LA FONTAINE – L’année de la naissance de Charles, j’ai acheté, comme mon père, une charge de maître des eaux et des forêts qui me rapportait un peu d’argent. Puis en 1654 j’ai publié ma première comé- die, L’Eunuque , inspirée de Térence, un auteur latin. Un vrai flop ! Aujourd’hui, tout le monde l’a oubliée. Portrait de Jean de La Fontaine par H. Rigaud, XVII e siècle. © PvE / Alamy banque d’images © akg-images / François Guénet ENTRETIEN : LA FONTAINE RACONTE SA VIE 17 Maison habitée par Jean de La Fontaine à Château-Thierry (lithographie du XIX e siècle).

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