Extrait Sport & Vie

hors-série n o 49 71 Un mariage impossible Voilà pour les danses sportives. Elles ne sont pas les seules à organiser des compétitions. C’est aussi le cas des danses dites «urbaines» dans la mesure où celles-ci sont souvent nées dans la rue avant d’investir parfois les ors des salles prestigieuses. «Il s’agit de danses d’empowerment, de prise de pouvoir. Des danses inventées par des minorités géné- ralement issues des diasporas africaines et qui tentent de sublimer ainsi leurs réa- lités sociales» explique la Brésilienne Ana Pi (2). Ce genre de danse évolue constamment. Dans les années 90, dans les night-clubs du nord de l’Europe (sur- tout en Belgique et aux Pays-Bas), on dansait le jumpstyle . Quelques années plus tard, à Paris, on ne parlait plus que de tecktonik et, en Australie, on dansait le shuffle sur de la musique électro (**). Le catalogue de ces danses urbaines s’étoffe chaque année. Certaines dis- paraissent. Puis il arrive qu’une d’entre elles se structure et se prête à l’orga- nisation de petites compétitions dans des formats qui, au fil du temps, sont de moins en moins improvisés. Prenons le hip-hop. Née à New York dans les ghettos du Bronx au début des années institutionnalisée en discipline spor- tive, pendant l’entre-deux-guerres. «Ce classement différencie les danses suivant l’ancienneté de leur usage en Europe et des exigences de tenue corporelle dis- tinctes: maintien droit, immobilité du bassin et port de tête pour les standards, souplesse et mouvements des hanches pour les latines» explique Elisabeth Dorier-Apprill, qui a dirigé un livre sur le sujet (1). Aujourd’hui, ces danses spor- tives réunissent des millions d’adeptes dans le monde et font l’objet de compé- titions, aux niveaux amateurs comme professionnels. Répartis selon leur âge et leur niveau, les couples de candidats sont jugés sur leurs qualités athlétiques et esthétiques. Les jurés prennent aussi en compte le rythme, la technique, l ’ h a rmon i e du couple, la tenue, l’élégance et l’interpré- tation. partagée en dit déjà long sur l’ambigüité du positionnement de la danse spor- tive. En 1997, le Comité international olympique (CIO) la reconnaît à son tour comme discipline à part entière et, avec l’esprit de catégorisation qui le carac- térise, en profite pour distinguer les «danses standards» et les «danses latines» . Les premières ont été spécifiquement codifiées par cinq grands professeurs britanniques en 1924 (*): 1/ la valse anglaise (aussi appelée valse lente), 2/ le slow fox, 3/ le tango, 4/ le quick step et 5/ la valse viennoise, qui est venue quelques années plus tard. Juste après la Deuxième guerre mondiale, on élar- git le panel avec l’ajout des danses dites «latines» : 6/ la samba, 7/ le cha-cha-cha, 8/ la rumba, 9/ le paso doble et 10/ le jive qui s’inspire des mouvements du rock et du boogie-woogie. Chacune de ces danses possède sa propre histoire, ses propres codes. Ses propres inco- hérences aussi. C’est ainsi que le tango se trouve rangé parmi les danses standards en dépit de son origine clairement latine. Et c’est le contraire pour le jive. Du coup, on pour- rait se demander ce qui diffé- rencie vraiment toutes ces danses. Serait-ce le tempo? Même pas! Celui du cha-cha-cha (entre 100 et 120 battements par minute) se confond parfois avec celui de la valse viennoise (jusqu’à 180). En fait, cette codification des pas a été construite afin d’établir des critères et des normes de notation à destination des jurys professionnels au moment où la danse de couple s’est (*) Il s’agit de Josephine Bradley, Eve Tymegate- Smith, Muriel Simmons, Lisle Humphreys et Victor Sylvester, tous membres de la britannique Imperial Society of Teachers of Dancing (Société impériale des professeurs de danse). (**) Cette danse puise ses origines dans les cla- quettes. La base du «shuffle» se compose de deux mouvements: le «tip step» ( «orteil-ta- lon» ) et le «running man» qui donne l’impres- sion que l’on court sur place. Le couple Katusha Demidova et Arunas Bizokas sont les monstres de la danse standard: dix titres de champion du monde! Yulia Zagoruychenko et Riccardo Cocchi les talonnent en danse latine: neuf titres de champion du monde. En breakdance, on accepte le combat au sol.

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