Extrait Sport & Vie

n o 176 15 de Kipchoge impressionnèrent les observateurs, comme cela avait été pré- cédemment le cas pour Jim Ratcliffe, le PDG d’Ineos. «Personnellement, je ne finis jamais dans cet état» avait-il commenté après la victoire du Kényan à Londres en 2016. Bref, plus personne n’ose fixer des limites au talent de Kipchoge. Dans ce contexte, «c’est possible» constitue bel et bien la plus sage des réponses. Qu’est-ce qui fait courir Eliud? A la date prévue du record, Eliud Kipchoge aura 34 ans et 11 mois. Ce n’est pas trop vieux pour exceller dans les sports d’endurance. Par le passé, on a même connu des recordmans du monde plus âgés que lui comme le Portugais Carlos Lopes (2 heures, 7 minutes et 12 secondes) en 1985 qui avait 38 ans à l’époque! Sans lui faire injure, on peut néanmoins affirmer qu’à son âge, Kipchoge n’est plus en mesure d’améliorer sa consommation maximale d’oxygène (VO 2 max). Sans doute se maintient-il actuellement sur une sorte de plateau avant de subir l’inéluctable déclin. Mais une VO 2 max ne progresse plus vraiment après 30 ans. Enfin, si. possible» se contentent de répondre les trois frères avec des accents nor- mands. Cela ne nous aide pas beau- coup. Pourtant le fait qu’on ne rejette plus catégoriquement cette éventualité constitue déjà une petite révolution. Jusqu’il y a peu, on pensait en effet qu’une telle performance dépassait à jamais les capacités humaines. Ensuite, on a dit que, oui, peut-être, battre un tel recordétait imaginable.Mais enprenant toujours soin de situer cet événement dans un avenir lointain, soit dans dix ou vingt ans selon les modèles prédic- tifs les plus optimistes (1). Puis deux exploits mirent à mal ces certitudes. Tous les deux signés du Kényan! D’abord, il y a eu la tentative de Monza et le fait qu’elle ait échoué d’un fifrelin. Plus stupéfiant encore, il y eut le nou- veau record du monde du mara- thon (2 heures, 1minute et 39 secondes) établi à Berlin le 16 septembre 2018. A l’arrivée, l’ivresse de joie et la fraîcheur de ce type avait échoué sur le circuit automobile de Monza en Italie. C’était le projet «Breaking 2» sponsorisé par la marque à la virgule. Kipchoge avait bouclé la distance en deux heures et 25 secondes. Heureux mais frustré! Depuis lors, il rumine une revanche. A moins que ce ne soit une obstination de son équipementier, Nike, ou de son nouveau sponsor, Ineos (**). Quoi qu’il en soit, une nouvelle tentative a été mise sur pied: c’est le «1h59’ Challenge» . Cette fois, cela se passera dans le parc du Prater à Vienne le 12 octobre 2019. Pour dic- ter le tempo, Kipchoge pourra compter notamment sur l’aide des trois frères les plus rapides de toute l’histoire de l’athlétisme norvégien: Henrik, Filip et Jakob Ingebrigtsen (***). Bien entendu, un tel projet est soumis à tellement d’aléas, notamment climatiques (tempé- rature, vent), que les spécialistes restent prudents sur les chances de succès. Kipchoge réussira-t-il son pari? «C’est (**) Ineos est un groupe chimique important. Jusqu’à présent, il jouissait d’une image désas- treuse, notamment pour le peu de considération qu’il réserve à l’environnement. Par ses investis- sements sportifs (voile, football, cyclisme), Ineos essaie désormais de se bâtir une autre image. L’intérêt pour le marathon est aussi celui de son patron, Jim Ratcliffe (66 ans), qui est lui-même coureur accompli. Il a participé à de nombreux marathons et à des courses d’ultra-endurance comme le célèbre Marathon des Comrades en Afrique du Sud (90 kilomètres). Une façon origi- nale de fêter ses 60 ans. (***) Henrik a été champion d’Europe sur 1500 mètres en 2012 et Filip, médaillé de bronze aux championnats du monde, toujours sur 1500 mètres. Quant au plus jeune des trois frères, Jakob (18 ans), il est champion d’Europe en titre du 1500 et du 5000 mètres. Les frangins Ingebrigtsen doivent emmener Kipchoge au triple galop. Jim Ratcliffe et son nouveau jouet A l’attaque!

RkJQdWJsaXNoZXIy MTEzNjkz