Extrait Sport & Vie

n o 175 35 BOXE Le jour où Joshua chut Beau, grand, fort et sympathique pour ne rien gâcher: le boxeur britannique Anthony Joshua avait tout du champion bankable pour les promoteurs de son sport . Sur la lancée de son titre olym- pique des super-lourds, acquis à Londres en 2012, on lui promet- tait donc un destin professionnel digne des légendes comme Joe Louis, Rocky Marciano, Mohamed Ali ou Mike Tyson. Tout se déroulait d’ailleurs à la perfection depuis son passage chez les pros: 22 combats, 22 victoires dont 21 par KO. Joshua remplissait les grandes stades comme Wembley ou le Millennium Stadium de Cardiff. Son parcours était aussi impressionnant que sa taille et son allonge (1,98 mètre). On ne voyait personne capable de lui faire de l’ombre. Mais à peine a-t-on gratté le vernis que Joshua ne semble plus être la machine implacable que l’on imaginait. Ses victoires? Ses titres? Ils doivent beaucoup à la pause-carrière de son compatriote Tyson Fury. Certes, Joshua a eu le mérite d’affron- ter et de battre l’Ukrainien Vladimir Klitschko, toujours courageux mais tout de même quadragénaire. Il est aussi venu à bout du modeste Néo-Zélandais Joseph Parker, sans toutefois tenir sa pro- messe de le mettre KO à la neuvième reprise. Et Dieu sait ce qu’il serait advenu de lui sans l’intervention hâtive de l’arbitre pour mettre fin à son combat face au Français Carlos Takam qui lui avait offert une formidable résistance, alors qu’il n’avait eu que deux semaines pour se préparer. Beaucoup de spécialistes se posaient donc la question de la véritable valeur du boxeur Anthony Joshua, d’autant qu’il refusait jusqu’à peu de traverser l’Atlantique pour trouver des adversaires à sa mesure. Deontay Wilder, le détenteur de la ceinture des lourds pour la WBC (World Boxing Council), le lui reprochait d’ailleurs assez. Lassé des critiques, l’Anglais est finalement parti à New York pour y remettre ses titres en jeu. Au départ, son challenger devait être Jarrell Miller, finalement écarté après trois (!) contrôles positifs aux tests antidopage. Pour le remplacer, on n’a rien trouvé de mieux qu’Andy Ruiz, un boxeur américain d’origine mexicaine qui présente la particularité d’être frappé d’embonpoint. Personne ne doutait de l’issue du combat. Seulement, le jour J, tout s’est déroulé à l’envers et c’est Ruiz qui s’est imposé en envoyant Joshua au tapis à quatre reprises jusqu’à ce que l’arbitre stoppe le combat au milieu du septième round. Une des plus grosses surprises de la boxe depuis la défaite de Mike Tyson contre Joe Douglas à Tokyo en févier 1990. Aussitôt, on en a annoncé la revanche, ce qui constitue un terrible casse- tête pour les organisateurs de la prochaine défense du titre IBF (International Boxing Federation) puisqu’un combat avait déjà été signé entre Joshua et le Bulgare Kubrat Pulev. En tant que nouveau champion, Ruiz aurait logiquement dû se substituer à Joshua en tant que rival de Pulev. Seulement, l’IBF est prisonnière d’une clause du contrat stipulant que Joshua pourrait prendre sa revanche sur Ruiz dans le cas improbable d’une défaite. Les pro- moteurs prennent désormais ce genre d’assurance pour ne pas se retrouver dans la même situation qu’après la défaite de Tyson face à Douglas. Lui aussi rêvait d’une revanche, évidemment. Mais celle-ci n’eut jamais lieu parce qu’entretemps, Douglas s’était fait étriller par Evander Holyfield. Bref, Pulev se retrouve sans adver- saire et l’IBF menace à présent de retirer son titre à Ruiz, ce qui ferait un imbroglio de plus dans l’histoire décidément tortueuse de la boxe. On comprend mieux la décision du CIO de se passer des services des caciques de ce milieu pour organiser son tournoi olympique à Tokyo. Un jab n’y retrouverait pas ses petits! PARIS 2024 Total au fond du puits! Anne Hidalgo ne voulait pas de Total comme sponsor des Jeux olympiques de 2024 et la maire de Paris a obtenu gain de cause, contre l’avis de Tony Estanguet. «Il serait difficilement compréhen- sible pour nos concitoyens que soient retenues des entreprises dont l’activité aurait un lourd impact sur l’environnement, en se fondant notamment sur le recours massif à des énergies carbo- nées» avait-elle écrit dans un courrier adressé en mars au pré- sident du COJO (Comité d’organisation des JO). Le géant pétrolier était pourtant prêt à mettre 150 millions d’euros sur la table pour apparaître parmi les partenaires de premier rang. L’affaire fut définitivement abandonnée lorsque, après un entretien avec Anne Hidalgo, le P-DG de Total Patrick Pouyanné déclara en substance qu’il préférait dégazer plutôt qu’être «un sponsor cloué au pilori» . Il faut dire que depuis le naufrage du pétrolier Erika en 1999 au large de la Bretagne et la terrible marée noire qui s’ensuivit, Total n’est jamais vraiment parvenu à redorer son blason si ce n’est auprès des actionnaires. Le sport, en tout cas, lui tourne le dos. En 2003, la compagnie avait déjà dû renoncer à sponsoriser la Fédération française de voile. Il ne lui reste guère que la Coupe d’Afrique des Nations, où le pétrolier joue presque à domicile tant il compte de sites d’exploitation sur ce continent, ainsi que le cyclisme après la reprise cette saison de l’équipe professionnelle de Jean-René Bernaudeau, sous l’égide de sa filiale Direct Energie. Pour une société qui ne sait pas comment utiliser les millions de bénéfices qu’elle génère, il reste évidemment la solution du mécénat. Total a déjà fait savoir qu’elle participerait pour 100 millions d’euros à la reconstruction de Notre-Dame. Cette fois, Hidalgo a accepté! Andy Ruiz devra faire de nouveaux trous dans les ceintures. Anne Hidalgo, Tony Estanguet en total désaccord Les pétroleurs

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