Extrait Sport & Vie

n o 167 25 les coureurs à pied se sont prudem- ment tenus à l’écart des haltères et des medicine-balls . Ils avaient tort! On sait aujourd’hui que les exercices de musculation sont bénéfiques. Même pour eux! En fin de croissance, ils sou- mettent la charpente osseuse à des pressions qui la renforcent. C’est pri- mordial pour bien vieillir. Il faut savoir que lamaturation du système squelet- tique survient assez tardivement dans la vie, vers 20 ans chez les hommes et 18 ans chez les femmes. En le stimulant par des exer- cices en force durant ces tranches d’âge, on améliore la solidité intrinsèque des os, limitant du même coup l’ostéoporose et les fractures sponta- nées, maux tristement célèbres pendant la vieillesse. Premier avantage. Ce n’est pas le seul. Plusieurs études (2) ont démon- tré que l’ajout d’exer- cices de musculation chez des sportifs d’endu- rance améliore considé- rablement l’économie de course. On consomme pot de moutarde. C’est exagéré, bien sûr. Mais il demeure qu’un hyper-dé- veloppement de la masse est plutôt préjudiciable aux performances. Et ce, même dans des disciplines exigeant de la force. Voyez les gabarits des hal- térophiles. Ils sont très différents de ceux des bodybuilders qui défilent en maillot sur les podiums des concours. C’est encore plus flagrant chez les athlètes qui excellent dans les sports d’endurance. Là où leurs collègues affichent une silhouette charnue, eux paraissent squelettiques et redoutent d’ailleurs toute prise de poids, trop conscients que ces kilos excédentaires coûtent cher à déplacer et que leur niveau de performance risquerait d’en pâtir. Cette crainte explique pourquoi, pendant des décennies, les cyclistes et Tout le monde aux haltères Il y a quelques années, nous avions fait l’interview du Russe Yuriy Sedykh (62 ans), toujours détenteur du record du monde du lancer du marteau avec un jet à 86,74 mètres réalisé à Stuttgart lors des Championnats d’Eu- rope d’athlétisme en 1986 (*). Il expli- quait en cette occasion qu’au sein de son groupe d’entraînement, il n’était jamais le meilleur aux différents ate- liers de travail de force. En revanche, en compétition, il était presque imbat- table, ce qui lui avait permis de décro- cher deux ors olympiques en 1976 et 1980.Cetémoignagemontrequ’aucun exercice en salle ne permet de repro- duire à l’identique les sollicitations du geste véritable mais qu’il convient de s’en rapprocher le plus possible, quitte à faire preuve d’imagination. Cette réflexion est d’ailleurs à la base de l’apparition de certaines nouvelles pratiques telles que le crossfit . Très en vogue aujourd’hui, ces entraînements préconisent d’effectuer des mouve- ments complexes (sauts, exercices aux anneaux, manipulation de poids) plutôt que les habituelles séries à la presse dans un seul plan de l’espace, qui ne nécessitent aucune coordi- nation. Certains chantres de ces méthodes innovantes se moquent ouvertement des culturistes dont la force ne serait qu’apparente et qui, malgré tous leursmuscles, peineraient à dévisser le couvercle d’un simple (*) «Complètement marteau» , Sport et Vie n°138, mai 2013, p. 14-17 Galen Rupp, la phobie du muscle La céiste franco-australienne Jessica Fox, tireuse d’élite LE SAVIEZ-VOUS? On connaissait déjà «l’entraînement croisé», qui consiste à pratiquer une discipline avec le but de progresser dans une autre (faire du vélo pour s’améliorer en course à pied, par exemple). Dans cet article, il convient plutôt d’utiliser l’expression «en- traînement concurrentiel» dans la mesure où on enchaîne immédiate- ment des efforts très différents. On sollicite donc l’organisme dans des registres non complémentaires et parfois même opposés.

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