Extrait L'Objet d'Art

CORRESPONDANCES Les relations entre Vieira da Silva et les Granville furent aussi épistolaires. Conservées dans les archives, lettres et cartes postales éclairent l’intense relation qui les unit et révèlent les personnalités de chacun. L a correspondance entre le couple Granville et les deux artistes, Vieira da Silva et Arpad Szenes, est abondante. Des lettres poignantes de Kathleen pendant l’Occupation aux cartes postales humo- ristiques de Vieira, ce sont des documents inédits qui ont pu être rassemblés et étudiés grâce aux archives de Florence Granville, de la fondation Arpad Szenes-Vieira da Silva (Lisbonne) et du Comité Arpad Szenes-Vieira da Silva (Paris). SOUS LA PLUME DE KATHLEEN L’ensemble des lettres couvre cinquante années d’une relation intime, solide, dans les bons comme dans les plus terribles mo- ments. Si la plupart des documents s'échangent entre les deux femmes, Pierre et Arpad restent néanmoins présents, signant ou ajoutant un quolibet. Les premières lettres de Kathleen, en 1938-1939, racontent la peur du conflit mondial, la mobilisa- tion de Pierre et l’attente de ses nouvelles, la joie des courtes permissions qui permettent au couple de se retrouver et le déplacement en zone libre. Elles évoquent aussi la montée de l’antisémitisme en France, la nécessité d’avoir du « piston » et les di#cultés de Kathleen à trouver du travail. Audétour deceséchanges, ladescriptionémerveilléed’un tableau : c’est Le Salon à Lisbonne (p. 24) envoyé en 1939 par Vieira pour l’anniversaire de son amie que Kathleen accroche « à la place d’honneur » et où l’artiste s’est représentée : « je parle avec ces personnages, la jeune femme qui me rappelle tant ma Bishon, un peu raide, un peu triste, ses bras tombant gracieusement [...] et Arpad tout vêtu de carreaux !! [...] J’en ai fait une description à Pierre, et ainsi il peut en jouir avec moi 1 . » Moins souvent mise en avant que Pierre dans la constitution de leur collection, Kathleen se révèle dans ces échanges. Sa vision personnelle transparaît ainsi au travers de ses chroniques de la vie artistique parisienne : « sommes allés aujourd’hui au Salon d’Automne ; défilé de croûtes et de crottes. Seul un panneau de Bonnard apportait de la vie et de la lumière 2 », Par Naïs Lefrançois 29 L’OBJET D’ART HORS - SÉRIE MARIA HELENA VIEIRA DA SILVA

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