Extrait L'Objet d'Art - HS n°162

Obsessions d’un peintre | L’OBJET D’ART 23 Paris, musée d’Orsay), il se rend aussi régulièrement au Louvre pour crayonner devant des tableaux qui l’inspirent. Intuitivement interpellé par la pureté des motifs qui ornent les vases grecs antiques, il les copie et s’entraîne ainsi à maîtriser le trait linéaire, une tech- nique qu’il emploiera dans ses œuvres ultérieures. Rive gauche by night Szafran arpente le bouillonnant quartier de Montparnasse ; il parlera d’ailleurs lui-même de Vavin comme de son « Eldorado ». Tandis qu’il occupe des ateliers de fortune, cité Falguière, rue Castagnary, rue Puget, ainsi que des garages, il vogue la nuit et le jour de café en café, de galerie en galerie. Côtoyer une faune éclectique, composée d’artistes, de poètes, de musiciens, de cinéastes, va constituer pour lui une vraie initiation à l’art et à la poésie. Szafran lit Autoportrait , vers 1959 Fusain sur papier, 78 x 58 cm. Paris, galerie Claude Bernard. Photo service de presse Photo © Galerie Claude Bernard – J.-L. Losi © Adagp, Paris, 2022 beaucoup – citons pêle-mêle Artaud, Nerval, Platon, Gurdjie", l’ Anthologie de l’humour noir de Breton – et fréquente des groupes d’avant-garde tels que les Fantasophes autour de Simone Collinet. Entre 1955 et 1960, il découvre Saint-Germain-des-Prés, dont la réputation commence peu à peu à supplanter celle de Montparnasse. Il se passionne pour la scène jazz, fait la rencontre de Django Reinhardt et de Chet Baker, et sombre dans la drogue, indissociable des nuits de Saint-Germain mais aussi liée aux expéri- mentations d’écritures et graphiques d’Henri Michaux que Szafran était justement en train de découvrir. Rétrospectivement, il considérera qu’il aura été deux fois miraculé : une première fois en échappant à l’ex- termination, lui qui fut un enfant juif caché pendant la guerre, et une seconde fois en réchappant à l’héroïne dans laquelle il avait sombré.

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