Extrait L'Objet d'Art

6 L’OBJET D’ART JANVIER 2023 Entre histoire, archéologie et histoire de l’art, une sélection de prêts exceptionnels venus d’Ouzbékistan raconte au Louvre dix-neuf siècles d’histoire en Asie centrale. Elle révèle en particulier les trésors artistiques et la richesse des influences des époques préislamiques, avec des œuvres jamais sorties du pays ou jamais montrées. C ’est une grande fresque civilisationnelle qu’a voulu retracer Yannick Lintz, ancienne directrice du département des Arts de l’Islam et commissaire de l’exposition avec Rocco Rante, archéologue au musée du Louvre. Elle commence au lendemain de la conquête d’Alexandre et s’achève après les derniers feux de l’empire timouride, sous la dynastie de Shaybanide, au temps de notre Renaissance occidentale. Le trésor de Dalverzin-tépé Cinq sections scandent ces dix-neuf siècles d’histoire. Au début du III e siècle avant J.-C., une multitude de royaumes et d’États-oasis se forment sur les vestiges de l’empire achéménide. Dans cette Asie cen- trale où la seule frontière naturelle est le fleuve Oxus, les frontières de ces royaumes anciens ne sont pas celles des États modernes ; le territoire ouzbek actuel recouvre une partie des anciennes provinces de l’empire perse, la Bactriane et la Sogdiane, qui s’étendaient aussi en Afghanistan et au Tadjikistan. Terre de passage, il accueille des va- gues migratoires successives qui forgent son identité et sa richesse culturelle. Issus de tribus nomades venues de Chine, les Kouchans fondent ainsi, du I er au III e siècle de notre ère, un vaste empire, dont té- moignent, au Louvre, les très expressives statues en terre crue peintes de Kalchayan et le trésor de Dalverzin-tépé : jamaismontré, même en Ouzbékistan où il est conservé dans une banque, c’est le plus grand découvert en Asie Centrale. De l’outre-noir de la porte de Ka!r Kala... Avec lesmigrations huns, le royaume de Sogdiane connaît aux siècles suivants un immense rayonnement ; sesmarchands sillonnent l’Asie ; il est au centre de ces routes caravanières que les commissaires de l’exposition se gardent bien d’appeler « routes de la soie » – terme ro- mantique inventé par le géographe allemand Ferdinand von Richthofen en 1877, mais bien réducteur au regard de la diversité des marchan- dises transportées. Des prêts, là encore exceptionnels, illustrent l’art de cour raffiné qui s’épanouit alors dans cette Asie centrale préisla- mique : la fresque monumentale d’Afrasiab, à côté de Samarcande, celle de Varakhsha, dans l’oasis de Boukhara, et la porte de l’ancienne forteresse de Kafir Kala, probable résidence hors-les-murs des sou- verains de Samarcande. Miraculeusement préservée de la destruc- tion par le feu par un processus de carbonisation parfait et sortie de fouille de manière tout aussi miraculeuse, elle montre, avec une finesse extraordinaire de détails, la grande déesse de la Bactriane, Nana, entourée d’adorants. EXPOSITIONS SPLENDEURS D’OUZBÉKISTAN AU MUSÉE DU LOUVRE Saufmentioncontraire, toutes les images reproduites iciportent lamentionPhotoservicedepresse.©ArtandCultureDevelopmentFoundation,RepublicofUzbekistan,AndreyArakelyan Fresque de Varakhsha. Tashkent, musée des Beaux-Arts. PARIS

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