Extrait L'Objet d'Art

6 L’OBJET D’ART NOVEMBRE 2021 EXPOSITIONS PICASSO ET LE LOUVRE JE T’AIME, MOI NON PLUS Au Louvre-Lens, une exposition très documentée et riche en chefs-d’œuvre explore les relations tumultueuses entre Picasso et le musée du Louvre. Un dialogue entre deux géants, qui éclaire d’un jour nouveau l’œuvre du maître espagnol et l’histoire récente du Louvre. « Q uand je suis arrivé à Paris, ce qui m’a le plus frappé, c’est le sarcophage de Cerveteri », affirmait Picasso. Dès son premier séjour en France, en 1900, à l’occasion de l’Expo- sition universelle, le peintre catalan, alors âgé de 19 ans, arpente en effet les salles du Louvre, observe, repère, imprime dans sa rétine tout ce qui peut nourrir son génie naissant. Jusqu’à son installation définitive à Paris, en 1904, il profitera de chacun de ses voyages dans la capitale pour retourner au musée, « rôdant tel un chien de chasse à la recherche d’une proie (...) parmi les sphinx, les idoles de basalte et les papyrus, les sarcophages peints en couleurs vives », comme l’écrit son ami l’Italien Ardengo Soffici. Ainsi débute la longue et fructueuse histoire d’amour entre le peintre espagnol et le plus grand musée du monde. Du moins avec ses œuvres, car ses relations avec l’institution muséale furent bien plus houleuses, comme le dévoile l’exposition du Louvre-Lens au fil d’un circuit en deux parties. « Deux parcours en miroir », ainsi que les qualifie Dimitri Salmon (collaborateur scientifique au département des Peintures du Louvre), qui en a assuré le commissariat : d’un côté, le Louvre vu par Picasso, de l’autre, Picasso vu par le Louvre. Pour évoquer le premier, le musée lensois n’a pas lésiné. L’exposition nous invite tout simplement à pénétrer dans un Louvre en versionminiature, reconstitué département par département ! Dialogue fertile entre Picasso et les maîtres Grâce à l’élégance de la scénographie (Valentina Dodi et Nicolas Groult), la magie opère. On suit le jeune Picasso dans les salles égyptiennes, et on l’imagine déambulant entre ses statues hiératiques – dont les volumes géométriques et les postures ressurgissent dans une Porteuse de jarre de 1935 –, ou s’arrêtant devant les portraits du Fayoum, dont les traits offrent de troublantes similarités avec certains de ses portraits ou autoportraits. Ces mises en regard se poursuivent dans les salles orientales, grecques, dans le Cabinet des dessins ou le département des Peintures, acmé du parcours. Parfois, l’influence d’œuvres précises est avérée, comme pour les têtes ibères du Cerro de los Santos, dont les visages stylisés et les grands yeux en amande jouèrent un rôle certain dans la gestation des Demoiselles d’Avignon Pablo Picasso, Autoportrait , Paris, [été 1907] - été 1908. Fusain sur papier, 53 e feuillet verso du carnet. Paris, musée national Picasso-Paris, dation Pablo Picasso, 1979, MP1863 (53v). Photo service de presse. © Succession Picasso 2021. © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris). Fragment de linceul peint avec portrait de momie, portrait dit d’Ammonius, Antinoé. Peinture à l’encaustique sur étoffe. Paris, département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre. Photo service de presse. © Musée du Louvre Dist. RMN-Grand Palais / Georges Poncet. LENS

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