Extrait L'Objet d'Art

20 L’OBJET D’ART MARS 2021 L orsqu’à la fin des années 1870, le riche amateur d’art Antony Roux (1883-1913) formule le souhait de publier une nouvelle édition illustrée des Fables de La Fontaine, il pense d’abord faire appel à diffé- rents artistes. Aidé dans ses recherches par Jules- Élie Delaunay, il fait alors la connaissance de Gustave Doré, Henri Gervex, Jules Jacquemart, Henri Harpignies... Mais sa rencontre avec Gustave Moreau, en 1879, va donner une tout autre orien- tation au projet. Roux est immédiatement séduit par l’œuvre du peintre et la communion entre les deux hommes est telle que, dès le 7 juillet 1879, Moreau livre une première fable, Phébus et Borée. Jusqu’en 1884, ce dernier travaillera sans relâche, pui- sant son inspiration auprès des animaux du Jardin des Plantes et multipliant les copies dans les expositions du Louvre ou de la Bibliothèque nationale de France. Il réunira ainsi pasmoins de 64 aquarelles, auxquelles viennent s’ajouter une ribambelle d’études préparatoires. Le musée Gustave Moreau retrace la genèse de ce magnifique ensemble le temps d’une exposition (35 des 64 aquarelles et une quarantaine de croquis et dessins ponctuent le parcours), s’appuyant notamment sur la riche correspondance entretenue par l’artiste et sonmécène entre 1879 et 1897 et que détaille le savant catalogue. Florie Lafond-Cornette «GustaveMoreau. Les Fables de La Fontaine», à voir dès la réou- verture dumusée Gustave Moreau (14 rue de La Rochefoucauld, 75009 Paris. Tél. 01 83 62 78 72) et jusqu’au 17 mai 2021. www.musee-moreau.fr Catalogue, collectif, coédition In Fine / musée Gustave Moreau, 320 p., 39 € . L’exposition se tiendra ensuite, sous une forme réduite, au châ- teau de Waddesdon Manor (Buckinghamshire) du 10 juin au 31 octobre 2021 (sous réserve de non-modification de ces dates). À LIRE également : Art & Métiers du Livre n° 342, à commander sur www.art-metiers-du-livre.com Gustave Moreau illustre La Fontaine Le Rat de ville et le Rat des champs C’est initialement le graveur et aquarelliste Jules Jacquemart qui devait illustrer cette célèbre fable pour Antony Roux. Mais son décès prématuré conduisit le collectionneur à la réclamer au plus vite à Gustave Moreau : « C’est une fable que chacun demande et je regrette beaucoup de ne pas l’avoir ». Le résultat plongea le commanditaire dans le plus grand ravissement : dans un foisonnant décor aux accents orientaux, une table richement dressée concentre toutes les vibrations de la lumière, mettant ainsi en valeur les deux rats en plein larcin, véritables protagonistes de l’intrigue. Moreau restitua ici des objets et des tableaux néerlandais et flamands qu’il avait pu admirer lors de ses fréquentes visites au Louvre. Le Rat de ville et le Rat des champs (Livre 1, Fable 9) (détail), 1881. Sanguine, graphite, aquarelle, gouache, 30,7 x 23,4 cm. Collection particulière. Photo service de presse. © Jean-Yves Lacôte PORTFOLIO « Autrefois le Rat de ville Invita le Rat des champs, D’une façon fort civile, À des reliefs d’ortolan. »

RkJQdWJsaXNoZXIy MTEzNjkz