Extrait L'Objet d'Art

58 L’OBJET D’ART FÉVRIER 2020 AVANT-GARDES ARTISTIQUES Formée en 1920-1921 à l’École des beaux-arts de Leeds, où elle rencontre Henry Moore, puis au Royal College of Art de Londres, Barbara Hepworth part ensuite en Italie, où elle épouse le sculpteur Paul Skeaping, dont elle a un fils. Elle fait la connaissance, en 1931, du peintre Ben Nicholson, avec qui elle a des triplés trois ans plus tard. Cette maternité l’inspirera dans son travail. Un de ses choix décisifs consiste à abandonner le modelage pour privilégier la taille directe, pratique qu’elle pour- suit tout au long de sa vie. Elle est avant tout passion- née par les matériaux et les techniques : « l’idée de sculpture est fondamentale pour moi », précise-t-elle. L’exposition s’ouvre sur les années 1930, juste après les premières sculptures de Barbara Hepworth, qui étaient figuratives et construites dans la masse. Les commissaires, Catherine Chevillot, directrice dumusée Rodin, et Sara Matson, conservateur à la Tate St Ives, en association avec la petite-fille de l’artiste, Sophie Bowness, ont tout d’abord abordé son travail par le prisme du rapport avec la France. En 1933, elle s’y rend avec BenNicholson. Ils y côtoient toute l’avant-garde eu- ropéenne. Elle visite l’atelier deHans Arp qui dans les an- nées 1930 est retourné à la sculpture en ronde bosse avec des formes très organiques. Elle croise des artistes tels que Naum Gabo, Alexander Cal- der, Pablo Picasso, Georges Braque ou Piet Mondrian, dont les lettres témoignent des liens amicaux qu’ils entretinrent. Souhai- tant promouvoir l’art non figuratif, Jean Hélion et Auguste Herbin fondent en 1933 Abstraction-Création, Barbara Hepworth s’associe au groupe avec lequel elle expose dès 1934. Elle rencontre surtout Brancusi dont la « joie vivante des formes » constitue une influence essentielle et raconte ainsi : « dans l’atelier de Brancusi j’ai découvert le sentiment miraculeux de l’éternitémé- langé à la pierre bien aimée et à la poussière de pierre ». FORMES ET MATIÈRES L’art de Barbara Hepworth est de plus en plus stylisé. Dans les années 1930, son basculement dans l’abs- traction lui permet de se concentrer sur l’évolution des formes en elles-mêmes, dans des jeux subtils entre les vides et les pleins. Les premières formes indépen- dantes sont polies à l’extrême, laissant des volumes organiques dialoguer les uns avec les autres. Non contente de les développer dans l’espace, elle intègre celui-ci à ses œuvres avec ses « formes percées », ses Pierced Forms , initiées au début des années 1930. Pierced Hemisphere I [Hémisphère percé I ], en 1937, résulte de ces recherches. En perçant la pierre, elle aboutit à « une forme et un espace abstraits ». Outre la découverte de ses peintures, dessins et col- lages, l’exposition permet de comprendre l’amour que porte l’artiste aux matériaux. La dernière salle du par- cours rassemble des œuvres de différentes périodes qui jouent avec les multiples textures et les couleurs. « J’aime disposer d’un grand choix de matériaux autour demoi dans l’atelier, qui restent parfois longtemps, voire des années, si bien que je développe une intimité avec chaque pièce. Une idée vient et il faut alors trouver le bon morceau de bois ou de pierre, le morceau absolument juste ; le pire qui puisse arriver à un sculpteur, c’est de ne pas avoir sous lamain lematériau dont il a besoin », affirme-t-elle. Outre les marbres, les albâtres, les Torso I ( Ulysse ) [ Torse I ( Ulysse )], 1958, présenté au musée Rodin lors de la Seconde exposition internationale de sculpture en 1961. Bronze, 90 x 52 x 31 cm. Hepworth Estate, en prêt à The Hepworth Wakefield. © Barbara Hepworth / Bowness Photo / Hepworth Estate BARBARA HEPWORTH , LA POÉSIE DE LA SCULPTURE

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