Extrait L'Objet d'Art

59 JUILLET-AOÛT 2018 L’OBJET D’ART L es commissaires, François Michaud et Erik Verha- gen, ont choisi d’ouvrir l’exposition sur une mise en regard de deux hommages : le monumental triptyque dédié le 1 er avril 1976 à André Malraux et celui, plus intime, au poète et ami Henri Michaux, le 18 janvier 1963, dont les modestes dimensions sont l’exception de l’accrochage. Tant Malraux que Michaux jouent un rôle spécifique dans la vie de Zao Wou-Ki, tout en étant des passionnés de l’Orient. L’écrivain et homme politique, qui meurt le 23 novembre 1976, a soutenu Zao Wou-Ki dans l’obtention de la nationalité française, en 1964. Ils font connaissance à l’occasion de la réédition de La Tentation de l’Occident qu’illustre le peintre. La rencontre avec Michaux a lieu en 1949, autour d’une Lecture de huit lithographies de Zao Wou- Ki et va être essentielle pour l’artiste : l’exposition au- tour de ce livre à la galerie La Hune en 1950marque sa reconnaissance en France, le poète l’introduit auprès du marchand Pierre Loeb, et dans les années 1970, c’est lui qui l’entraîne sur la voie du retour, longtemps refusé, à l’encre de Chine. La poésie ZAOWOU-KI Le musée d’Art moderne de la Ville de Paris rend un magistral hommage à Zao Wou-Ki (1920-2013), artiste d’origine chinoise. Avec le soutien de la Fondation créée par sa dernière épouse, l’ex- position commence au basculement de l’œuvre vers l’abstraction, dans les années 1950, et rassemble une sélection d’une quaran- taine de grands formats, dont un ensemble inédit d’encres de 2006. / Par Fanny Drugeon, docteur en histoire de l’art LES VIES DE ZAO WOU-KI L’exposition déploie un parcours chronologique à par- tir d’une sélection d’œuvres, principalement de grand format correspondant au passage de l’artiste vers l’abstraction. Né à Pékin, formé à l’École des beaux- arts de Hangzhou, Zao Wou-ki s’installe à Paris en 1948, cherchant à s’éloigner de la tradition chinoise, influencé par l’œuvre de Paul Klee ou de Paul Cézanne. Lesannées1950sontfondamentalesdanssonévolution. Il explique ainsi à propos de cette période : «Ma peinture devint illisible. Natures mortes et fleurs disparurent. J’essayais de déceler, avec des signes, quelque chose d’imaginaire qui s’inscrivait sur des fonds presque monochromes ». La progression vers la gestualité est frappante dans des œuvres telles que Traversée des apparences (1956) ou Nous deux (1957), qui renvoie au poème écrit par Henri Michaux à la mort tragique de sa femme en 1948 et à la séparation de Zao Wou-Ki et de son épouse Lan-Lan. Les signes s’amplifient et se distendent pour se fondre progressivement dans la couleur et l’espace pictural. Hommage à Matisse – 02.02.86 , 1986. Huile sur toile, 162 x 130 cm. Collection particulière. Photo service de presse. © Adagp, Paris 2018 / D. Bouchard de la couleur

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