Histoire de l'Antiquité à nos jours

Vauban et la fortification bastionnée 25 Ses emprunts Vauban emprunte, au passé comme à ses contemporains, même ennemis. En 1684, le siège de Luxembourg voit les assauts des Français se casser presque les dents sur des redoutes entièrement casematées imaginées par un ingénieur du roi d’Espagne. Aussitôt la ville conquise, l’ingénieur français les démultiplie en les améliorant, avant de les utiliser quelques années plus tard à Dinant, sur la Meuse. Il emprunte et il s’adapte à la montagne. Villefranche de Conflent, dans les Pyrénées, est atypique : une grotte préhis- torique, la Cova Bastera, est aménagée en cave à canon pour enfiler la route d’accès à la petite ville forte. De l’autre côté, sur la montagne, le fort Libéria offre ses embrasures étagées dans de massives maçonneries au plan apparemment biscornu, mais qui épouse étroitement le rocher de manière à empêcher toute approche. Autour de Briançon, dans les Alpes, Vauban et ses successeurs, parce qu’il n’aura pas le temps ni les moyens de tout terminer, plante ici une redoute carrée (fort des Sallettes), là un ouvrage à couronne peu régulier certes (fort des Têtes), ailleurs un fort bastionné (fort du Randouillet). À Trarbach, sur la Moselle allemande, ce sont trois tours de deux, trois ou quatre niveaux, ronde, en U, en fer à cheval, qui se succèdent en trois lignes au-dessus de la petite cité. Aucun standard, aucune norme, aucun plan type n’est utilisé, ni théorisé d’ailleurs. À gauche. Cova Bastera, Villefranche-de- Conflent. D. R. À droite. Fort-Liberia, Villefranche-de- Conflent. D. R. On l’a dit, Vauban a toujours refusé d’écrire tout manuel ou traité de fortification. Du bout des lèvres, il cautionne, en 1687, le petit livre de l’abbé Du Fay, qui porte son nom, Manière de fortifier selon Monsieur de Vauban . Son collaborateur Joseph Sauveur compose un traité manuscrit qui ne sera jamais édité, comme fait son secrétaire Pierre Clément. L’ingénieur géo- graphe Jean-Baptiste Naudin, qui ne dépend pas de Vauban puisque les levés topographiques et l’établissement des cartes géographiques sont un département distinct de celui des forti- fications, fait paraître, en 1695, un ouvrage intitulé L’ingénieur français (…). Avec la méthode de Monsieur de Vauban, et l’expli- cation de son nouveau système  ; celui-ci consiste dans les tours bastionnées telles qu’elles sont à Landau. C’est au XVIII e  siècle que des professeurs d’art militaire vont d’abord schématiser et réduire l’architecture militaire de Vauban à trois systèmes, selon un chapitrage facile aux apprentis officiers. Sa vraie for- tification restera distincte de ces bastions de papier dans les- quels il ne se serait pas reconnu, tant sa créativité comme ses reprises en matière de formes architecturales sont variées et surtout non systémiques. Vue générale du site de Briançon avec la ville haute, le fort du château, le fort des Salettes et le fort des Têtes. Photo octobre 2011. CC BY 3.0.

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