Histoire de l'Antiquité à nos jours

35 L’Académie des sciences L’Académie des sciences a été créée en 1666 dans lemouvement de sociabilité savante du premier XVII e  siècle, par Louis XIV et Colbert. Cette institution comprend au départ six géomètres et sept physi- ciens afinde contrôler les découvertes et recueillir leur gloire. Il s’agit aussi du début d’une professionnalisation du statut de l’homme de science. La conception du savant était jusque-là celle d’un homme désintéressé qui n’attendait rien en échange des services rendus, qui ne cherchait pas à publier à titre personnel mais seulement à échan- ger avec ceux susceptibles de le comprendre. Les six académies fon- dées par Louis XIV correspondent à une fonction d’expertise des connaissances commanditée par le pouvoir royal mais aussi d’expé- rimentation et de dissertations doctrinales de ces mêmes connais- sances en dehors des débats religieux. En 1699, la paix revenue après le traité de Ryswick de 1697, un nouveau règlement de l’Académie des sciences élaboré par le ministre Ponchartrain et son neveu l’abbé Bignon, président de la compagnie, consacre l’évolution de l’institution. Fontenelle Aqueduc de Maintenon, recueil : Topographique de la France . Département de l’Eure-et-Loir ; dessinateur non identifié, architecte : Sébastien Le Prestre Vauban, XVII e  siècle. BnF, Paris. parle de renouvellement, il s’agit d’amélioration des tâches anté- rieures et de la création d’un statut novateur. Ainsi, il prévoit l’en- trée de scientifiques non professionnels dits honoraires et des membres étrangers dénommés associés. Et c’est à la séance du mercredi 18 février 1699 que M. de Vauban est nommé à la plu- ralité des voix pour être proposé en qualité d’académicien hono- raire. Newton, trois jours plus tard, sera proposé comme associé étranger, tout comme Leibniz. Vauban aura l’honneur d’assister aux séances sans avoir la néces- sité de fournir des travaux (ce qui est une obligation pour les pensionnaires). Ce choix marque la reconnaissance des services rendus à la royauté et l’usage important des mathématiques dans ses travaux et recherches, notamment dans les arts méca- niques, conformément d’ailleurs au nouveau règlement lu par l’abbé Bignon, président de l’assemblée le 4 février 1699 : «  Les honoraires seront toujours regnicoles et recommandables par leur intelligence dans les Mathématiques, ou dans la physique, desquels l’un sera président; et aucuns d’eux ne pourra devenir pensionnaire. » Vauban et les travaux mathématiques Sébastien Le Prestre est donc choisi entre autres pour « son intelligence des mathématiques », ce que soulignera magnifiquement Fontenelle, en faisant l’éloge funèbre de Vauban en 1707 : « Personne n’avoit mieux que lui rappelé du Ciel les Mathematiques, pour les occuper aux besoins des Hommes, & elles avoient pris entre ses mains une utilité aussi glorieuse peut-être que leur plus grande sublimité » ( Histoire de l’Académie royale des Sciences , Compagnie des Libraires, Paris, 1733, année 1707, p. 172). Pourtant, l’ingénieur avait eu l’occasion de se confronter aux académiciens en 1684, pour le projet de construction de l’aqueduc de Maintenon visant à amener les eaux de l’Eure à Versailles. Les grandes arches aériennes d’un aqueduc qui ressemblait fort au chef-d’œuvre romain du pont du Gard avaient été préférées à « l’aqueduc rampant » de Vauban, c’est-à-dire une tranchée ouverte avec siphon. C’est Louvois, surintendant des Bâtiments, qui s’était appuyé sur l’avis des membres de l’Académie pour ce choix, ordonnant à Vauban de s’y soumettre. Cet énorme chantier débute enmai 1685. Son coût finan- cier et humain sera lourd et l’ouvrage ne sera jamais terminé, la guerre exigeant les subsides qui auraient été nécessaires pour le mener à bien (huit millions de livres ont cependant été investis et les soldats, main- d’œuvre des terrassements, ont été décimés par les fièvres dans ces terrains très humides). Malgré ce différend, Vauban reconnaît à l’Académie son rôle de comité scientifique comme il l’écrit au ministre Chamillart le 6 août 1702 à propos d’un certain Thomas Lorrain, qui a mis au point une machine : « Ne

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