Histoire de l'Antiquité à nos jours

La roche dite du « Sorcier ». Sauf mention contraire, les photos de cet article sont créditées : © Département 06 – musée des Merveilles LA VALLÉE DES MERVEILLES Tout ici semble appeler à la fantasmagorie : la difficulté d’accès au lieu, son caractère désertique et minéral, la force des orages et enfin les toponymes qui évoquent fables et légendes : la vallée des Merveilles (du latin mirabilia, « choses étonnantes »), la vallée de la Valmasque (du piémontais masca , « sorcière »), le pas du Diable… Ce site de renommée internationale présente sur un espace d’environ 20 km² plusieurs dizaines de milliers de gravures rupestres réalisées sur des blocs rocheux ou des dalles de pélite de couleurs variées appelées « ciappes ». Elles datent pour la plupart du Néolithique et de l’âge du Bronze, mais certaines ont été réalisées entre l’époque romaine et le XX e siècle. Les idéogrammes de la Protohistoire attisent tout particulièrement la curiosité et l’imagination des visiteurs comme des chercheurs qui s’interrogent sur les représentations mentales ayant précédé et conduit le geste des graveurs. Depuis plus d’un siècle, des spécialistes ont essentiellement été tentés de retrouver les significations symboliques ou religieuses de ces gravures. C’est là un exercice compliqué et périlleux qui, comme l’indiquait dans les années 1960 le spécialiste de la préhistoire, André Leroi-Gourhan, revient à vouloir comprendre les vitraux d’une église sans avoir lu la Bible. LES GRANDS DÉCOUVREURS En 1868, le premier découvreur authentique du site est le botaniste anglais Matthew Moggridge qui parle de signes « cupulés » aux formes répétées et associées « comme des hiéroglyphes ». Après lui, le préhistorien français Émile Rivière se rend sur place en 1877 et, pour la première fois, date les gravures représentant des armes de l’âge du Bronze, en les assimilant à des signes symboliques. Mais le plus efficace est sans doute Clarence Bicknell, un érudit botaniste anglais venu s’aventurer dans l’arrière-pays liguro-mentonnais en quête de plantes rares. De 1897 à 1917, il applique à l’étude des roches gravées de véritables techniques scientifiques : il les photographie, les dessine, réalise des relevés, les classe et remplit des carnets de terrain sur lesquels il les positionne. Ses travaux sont repris en 1922 par l’Italien Piero Barocelli, surintendant des Antiquités de Ligurie, Piémont et Lombardie, puis par Carlo Conti à partir de 1927. À des fins de recherche, ce sculpteur italien divise le site en vingt zones, à leur tour divisées en groupes et en roches. Il réalise en outre des centaines de moulages en plâtre et, en 1942, il se consacre à la fouille de l’abri sous roche dit « Gias del Ciari » (« abri de la souris » en piémontais). Après la guerre, en 1947, les ultimes modifications de frontière situent la totalité des zones gravées en France. Maurice Louis est nommé conservateur, puis, à sa mort (1966), le professeur Henry de Lumley lui succède et entreprend des recherches continues sur le site. 21

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