Extrait Dossiers de l'Art

60 / DOSSIERS DE L’ART 305 Ce que Vermeer a légué à son temps La profonde originalité de Vermeer ne se manifeste pas dans les sujets choisis, mais dans la manière de les traiter, que certains peintres ont très ponctuellement reprise. Traitée à la manière d’une histoire, la scène de genre devient avec lui une peinture moderne qui met en exergue un mouvement interrompu et invite à une expérience sensible de la vie quotidienne. Une leçon profonde, qui n’a pas suscité d’héritiers au sens strict mais qui a marqué son temps. PAR MICHÈLE-CAROLINE HECK, PROFESSEUR ÉMÉRITE D’HISTOIRE DE L’ART MODERNE, UNIVERSITÉ PAUL-VALÉRY, MONTPELLIER Vermeer n’eut ni atelier ni élève. Il jouissait cependant d’une grande réputa- tion dont témoigne le prix élevé atteint par ses œuvres. Le nombre réduit de ses tableaux, restés chez des collectionneurs privés pendant plus de vingt ans après sa mort, justifie très certainement la faible diffusion de son art et sa rare présence dans la littérature artistique. On ne peut, contrairement à Rembrandt, parler d’héritiers au sens strict du mot. En revanche il a marqué ses contem- porains de Delft et d’ailleurs en contribuant à la transformation profonde de la scène de genre en Hollande, mettant en place de nouvelles normes. Plutôt que d’influence, il conviendrait de parler d’émulation entre les artistes, chacun cherchant, à travers des thèmes et des motifs communs, à affirmer sa propre singularité. Les caractères de l’art de Vermeer, tels qu’ils étaient perçus par ses contemporains, et son apport à un style que l’on peut qualifier de collectif apparaissent alors plus clairement. n Pieter de Hooch, La Cour d’une maison de Delft , 1658. Huile sur toile, 73,5 x 60 cm Londres, The National Gallery © The National Gallery, London / Scala, Florence

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