Extrait Dossier de l'Art

4 / DOSSIER DE L’ART 288 Dans sa Chronique des ducs de Bourgogne , l’historio- graphe Chastellain (1405 ?-1475) ne manque pas de faire l’éloge des quatre princes de « haut vol » qui ont fait la renommée des États bourguignons. Si Philippe le Bon (1419-1467) gère désormais ses pays du Nord, il ne dirige pas lui-même le gouvernement des pays méridionaux ; il visite d’ailleurs très rarement la Bourgogne. Autonome et bien gouvernée sans contrainte directe du duc, la contri- bution financière de celle-ci est stable. Ses ressources importantes sont assurées par l’activité économique confortant ainsi le pouvoir ducal. Les hauts fonction- naires qui œuvrent à ce bon fonctionnement tant admi- nistratif que politique sont souvent récompensés pour leur dévouement au « Bien public ». Ils vont asseoir leur réussite sociale et imiter le prince dans leur commande artistique qui, pour certains, ne manque ni d’ambition ni d’audace. La double exposition « Miroir du Prince » se propose de mettre en exergue cette commande en deux lieux, le musée Rolin d’Autun et le musée Vivant Denon de Chalon-sur-Saône, avec le concours exceptionnel du musée du Louvre, mais également d’institutions publiques et de collectionneurs privés. En 1994, la ville d’Autun proposa une exposition en deux volets traitant du faste des Rolin, au musée Rolin et à l’Hôtel-Dieu de Beaune : « La bonne étoile des Rolin ». Elle permit de réunir historiens, archivistes, historiens de l’art autour du mécénat de cette famille autunoise dont le représentant le plus célèbre, Nicolas Rolin, fut anobli et nommé chancelier par Philippe le Bon. Leurs recherches donnèrent naissance à de nouvelles contributions scien- tifiques qui furent publiées dans La splendeur des Rolin , aux éditions Picard (1999). La signature en janvier 2010 d’une convention cadre avec le musée du Louvre donna la liberté à la Ville d’Autun d’initier un partenariat original autour de son riche patri- moine et d’accompagner la rénovation et l’extension de son musée municipal. Ainsi naquirent « Les rendez-vous du Louvre », des expositions favorisant la recherche scien- tifique autour d’œuvres inédites ou de chefs-d’œuvre intemporels (2012, « Bologne et le pontifical d’Autun. Un chef-d’œuvre du Trecento » ; 2014, « De Goya à Delacroix, les relations artistiques de la famille Guillemardet » ; 2020, « Ève ou la folle tentation »). Le musée Vivant Denon s’associe en 2021 au musée Rolin pour ce quatrième Rendez-vous du Louvre. Si Autun a choisi de mettre l’accent sur la commande artistique de deux familles originaires de cette cité, les Rolin et les Clugny, Chalon-sur-Saône entend souligner le rôle essen- tiel de Nicolas et Jean Rolin, également présents dans le cœur ancien de la ville : l’un propriétaire d’un hôtel dit « La Chancellerie », le second, de par sa fonction épiscopale, œuvrant en la cathédrale Saint-Vincent. Succédèrent à ce dernier Jean Germain, qui fut le premier chancelier de l’ordre de la Toison d’or, puis Jean et André de Poupet. S’inscrivant dans ce Val de Saône, important carrefour d’échanges entre 1270 et 1430, Chalon-sur-Saône était renommée pour sa foire qui avait lieu deux fois par an et qui témoignait de cette activité commerciale : c’était alors une source de revenus plus importante que la production agricole. Ses ateliers monétaires jouaient également un rôle de tout premier ordre. Ces échanges, qui servirent l’économie, portèrent leur fruit dans le domaine artistique dont nous commençons à mieux cerner les différents courants et certaines personnalités, telle celle d’Antoine Le Moiturier. Gageons un bel avenir pour de nouvelles recherches sur ce sujet qui n’en est qu’à ses prémices ! Brigitte Maurice-Chabard Agathe Mathiaut-Legros n Frontispice de l’ouvrage de Martin Le Franc, Le Champion des Dames , 1440 : dédicace au duc Philippe le Bon. Manuscrit sur parchemin. Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms, Français 12476, f. 1v. © BnF [ Avant-propos ]

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