Extrait Dossier de l'Art

10 / DOSSIER DE L’ART 277 National Gallery), et plus encore de la Sainte Anne pour plusieurs de ses madones. Il admire les savantes compositions, le sub- til équilibre des poses et les expressions si profondes de son aîné. De Michel-Ange, il retient la puissance des anatomies, le dynamisme des mouvements et les terribles visages. Il s’intéresse également aux œuvres de Fra Bartolomeo dont le style sobre et épuré le séduit, tout comme la description sensible de ses paysages. Vasari rapporte que Raphaël se lie alors d’amitié avec tout un cercle de jeunes artistes florentins, tels Ridolfo Ghirlandaio et Aristotile da Sangallo. Dans l’ombre des plus grands maîtres, il parvient à tisser des liens avec quelques grandes familles floren- tines, notamment avec Taddeo Taddei, Lorenzo Nasi pour lequel il peint la Madone au chardonne- ret (Florence, O!ces) ou Agnolo Doni (p. 17), qui lui commande son e!gie et celle de son épouse Maddalena (Florence, O!ces). Vers une synthèse magistrale Le style péruginesque de Raphaël se transforme alors complètement. La Madone à la prairie , datable de 1505 ou 1506, illustre ce nouveau chapitre. L’ordonnance pyrami- dale, la monumentalité des person- nages, la subtile interaction entre les figures et la douceur des expres- sions doivent beaucoup à Léonard et à sa Sainte Anne . Les visages perdent leur forme ovale pour une rondeur idéalisée plus naturaliste, la gestuelle gagne en souplesse Q Raphaël, Vierge à la prairie , dit aussi Madone du Belvédère , daté 1506 Huile sur bois, 113 x 88,5 cm. Vienne, Kunsthistorisches Museum © akg-images Q Raphaël, étude de vieillard barbu, d’après une sculpture inachevée de saint Matthieu par Michel-Ange. Plume et encre brune, 22,8 x 31,8 cm. Londres, British Museum © The British Museum, Londres, dist. RMN / The Trustees of the British Museum Florence, berceau de la manière moderne Vers 1504, Raphaël vient s’installer plus durablement à Florence. La ville connaît alors une e#ervescence artistique extraordinaire. Léonard de Vinci puis Michel- Ange conçoivent des œuvres d’une puissance d’expression inconnue jusqu’alors. Giorgio Vasari décrivit quelques décennies plus tard cette révolution menée par Léonard qui « en commençant cette troisième manière, que nous voulons appeler la moderne, outre l’impétuosité et bravoure du dessin, et outre la capacité à contrefaire subtile- ment toutes les finesses de la nature telles qu’elles sont, avec bonne règle, le meilleur ordre, une mesure droite, un dessin parfait et une grâce divine, donna vraiment à ses figures le mouvement et le sou$e ». Il n’y a rien d’étonnant à ce que cette manière moderne se soit développée à Florence où tant de maîtres plus anciens l’avaient préfigurée. Ces artistes, restés modernes, continuaient d’ailleurs à être étudiés par la nouvelle génération. Vasari rappelle ainsi que le jeune Urbinate étudia les fresques de Masaccio dans la chapelle Brancacci, et l’on trouve, parmi ses dessins, plusieurs figures inspirées des sculptures de Donatello. Il est avant tout ébloui par la manière moderne de Léonard et de Michel-Ange dont il copie les inventions, tel le monu- mental David (p. 50) placé devant le palais de la Seigneurie en 1504. En ces mêmes années s’a"rme le talent de Fra Bartolomeo et d’Andrea del Sarto ; ils incarneront à Florence un style classique que Raphaël développera à Rome.

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