Extrait Dossier de l'Art n°267

DOSSIER DE L’ART 267 / 13 L ES travaux d’Erick Noël ont révélé la présence en France, dès le XVIII e siècle, de milliers d’indivi- dus considérés comme noirs, « surtout lorsqu’ils sont esclaves aux Îles ou lors- qu’ils entrent, clandestinement ou non, dans le royaume dont toute personne qui foule le sol est réputée libre 1 " ». Dans un contexte monarchique aux fortes tensions et inégalités sociales, l’histo- rien a mis en lumière des parcours de vie d’enfants, de femmes et d’hommes « de couleur " », souvent méconnus, et décrit les difficultés de leurs conditions à Paris, Nantes ou encore Bordeaux en tant que domestiques, artisans, perruquiers ou couturières. Quelques rares personnalités noires, comme le chevalier de Saint-George ou le peintre Guillaume Guillon Lethière, évoluant dans la haute société, auront un destin exceptionnel contredisant les préjugés de race et l’imagerie littéraire large- ment diffusée du « bon sauvage ». Le décret de 1794 La fin de l’Ancien Régime est mar- quée en France par une prise de conscience nouvelle de la condition noire et une politisation des discours. Les partisans de l’émancipation s’op- posent aux défenseurs de l’esclavage. Au mois de février 1788 est créée la Société des amis des Noirs par Jacques Pierre Brissot. Elle s’inspire 1794-1848 Être noir en France Q Jean-Baptiste Lesueur, Représentant du peuple en mission, à droite : « Hommes de couleur, députés des colonies à la Convention », 1789-98. Gouache sur carton découpé et collé sur papier, 40 x 56,8 cm Paris, musée Carnavalet – Histoire de Paris © Musée Carnavalet / Roger-Viollet des quakers de Philadelphie et de Londres. Constituée de notables et de penseurs disciples des Lumières, elle se donne pour objectif d’obtenir un accord international d’abolition de la traite pour établir ensuite un plan progressif de sortie de l’escla- vage. En parallèle des luttes enga- gées sur le terrain parlementaire, un combat plus discret se joue à Paris mené par un groupe de gens de cou- leur autour du quarteron Raymond, D’une abolition de l’esclavage à l’autre, la première moitié du XIX e siècle maintient la population noire de France, outre-mer mais aussi en métropole, dans l’incertitude des espoirs anéantis, accompagnant le long chemin vers la fin du premier empire colonial.

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