Extrait Dossier de l'Art

UNE DISTRIBUTION NOVATRICE L’apparence du château est donc moderne sans être révolutionnaire. Il n’en va pas de même de la distribution intérieure, beaucoup plus ori- ginale. Dans le château français tel que la Renaissance l’a codifié, l’aile principale est généralement en fond de cour, vis-à-vis de l’entrée. Une porte au centre de cette aile donne accès à l’escalier qui dessert, au premier étage, l’appartement principal, celui du seigneur, doté de nom- breux dégagements, dont une galerie dans une aile en retour. À Écouen, la galerie est placée au premier étage de l’aile en fond de cour, tandis que six petits logements indépendants, accessibles par des portes individuelles ouvrant sur l’extérieur, occupent le rez-de-chaussée. Il faut se rendre dans l’aile gauche (du côté sud) pour trouver l’appartement du connétable et de son épouse, au premier étage. Cette distribution sans précédent dans l’archi- tecture française fut choisie par Anne de Montmorency qui, en tant que grand maître de France, était en outre chargé d’organiser les céré- monies et la vie quotidienne de la cour. Il en connaissait donc bien les rouages et les besoins. En renonçant à occuper l’aile du fond, il souhaitait disposer d’espaces de grande ampleur pour pou- voir recevoir le roi et la reine, auxquels il réserva l’aile droite (du côté nord). Tombé en disgrâce en 1541, le connétable n’aura cependant jamais l’occasion de recevoir François I er dans son châ- teau, mais sa stratégie fonctionnera parfaitement avec Henri II qui se rendra à Écouen une fois par an en moyenne tout au long de son règne. Écouen est une demeure que l’on peut véritable- ment qualifier de fonctionnelle. Elle comportait dix escaliers : deux degrés d’honneur (le premier dans l’aile sud pour les maîtres des lieux ; le second dans l’aile nord pour l’appartement du roi) ; quatre grands escaliers en vis dans les angles, doublés 9 verticaux qui forment comme un quadrillage, conformément à une for- mule qui a connu son principal épanouissement dans le Val de Loire au début du XVI e siècle. Le château de Bury (vestiges, près de Blois) et celui de Nantouillet en Ile-de-France sont des précédents illustres de ce système. Par ailleurs, les tours d’angle circulaires de la fortification médiévale sont remplacées par des constructions de plan rectangu- laire, qui abritent des espaces plus vastes et plus faciles à aménager : les pavillons. Le château d’Ancy-le-Franc, entrepris au même moment en Bourgogne, ou le Louvre, réédifié à partir de 1546, présentent un parti analogue, qui prend naissance dans les années 1540. LE CHÂTEAU D’ÉCOUEN CI-CONTRE Jean Bullant et alii , façade nord abritant les appartements royaux, vers 1538-60 © RMN (musée de la Renaissance, château d’Écouen) – G. Blot PAGE DE GAUCHE Jacques Androuet du Cerceau, Vue à vol d’oiseau du château d’Écouen Eau-forte, 26 x 45 cm. Éditée en 1579, extraite de l'ouvrage Les plus excellents bâtiments de France , 1576-79 © RMN (musée de la Renaissance, château d'Écouen) – D.R.

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