Extrait Archéologia

25 Avec la proximité de la rivière mais des crues supportables, des prés humides facilement transformables en terres agricoles fertiles et une bonne orientation au sud, le lieu-dit actuel les Pétreaux à Changis-sur-Marne avait tout pour séduire les hommes du Néolithique qui décidèrent d’y bâtir leurs maisons. Des générations s’y sont ensuite succédé jusqu’à la fin de l’indépendance gauloise, soit pendant environ 4 500 ans. Grâce à un triple partenariat (État SRAIF, carrière de granulats Morillon Corvol puis CEMEX, Afan puis Inrap), diverses interven- tions archéologiques y ont eu lieu de 1995 à 2005, sur une soixantaine d’hectares. La vaste emprise des travaux offre plus de probabilités de comprendre les liens spatiaux et temporels entre diverses struc- tures (habitats, fosses, voies, sépultures). Cette zone ayant été préservée de toute construction depuis la période romaine, la présence de vestiges ne faisait aucun doute. Le site s’est même révélé exceptionnel par la pérennité des habitats dès le Néolithique ancien mais surtout aux âges du Bronze et du Fer, dans un paysage naturel qui s’ouvre progressivement ; exceptionnel à double titre par la concordance, très rarement possible à mettre en évidence, des zones funéraires associées aux fermes, pour le Bronze final et pour la période gauloise. ANNEAUX D’OR Le cimetière du Bronze final a offert la plus impor- tante collection européenne de hair rings (anneaux de cheveux). On continue d’appeler ainsi ces petits anneaux de feuilles d’or bien que l’on ne sache pas exactement où et comment étaient portés ces ornements. Les 23 anneaux découverts sur le site de Changis étaient bien portés par les morts lors de la crémation sur le bûcher, à l’unité ou par paire. Ils ont été trouvés à la fouille ou en labora- toire lors du tamisage systématique des sédiments des sépultures. De 13 mm de diamètre moyen, ils appartiennent au domaine atlantique (Irlande, îles britanniques, Belgique, Nord de la France et Bassin parisien) et sont de fabrication complexe : une feuille d’or recouvre un anneau en alliage cui- vreux sur lequel elle s’enroule ; on connait un seul décor strié. L’analyse élémentaire de ces anneaux montre un alliage à 80 % d’or probablement natif, comparable à celui des anneaux du Trou de Han à Han-sur-Lesse (Belgique). Paire d’anneaux à la feuille d’or parmi les esquilles d’os du sédiment cendreux du dépôt en pleine terre d’un individu, probablement féminin. Phase moyenne du Bronze final. © V. Brunet, Inrap Anneaux à la feuille d’or et perles de verre bleu de provenance lointaine (Fratesina, Italie) sont les restes des parures exceptionnelles des défunts incinérés au milieu du Bronze final. © V. Brunet, Inrap Dernière chance avant destruction Au nord de la ligne ferroviaire Paris-Bâle qui longe le site, la zone avait été exploitée dès 1950 par d’anciennes carrières et le niveau de terrain abaissé de plusieurs mètres, ce qui avait supprimé toute possibilité d’étude archéologique postérieure. La fouille des Pé- treaux représentait donc la dernière chance de reconnaissance des traces anciennes et de compréhension des différents systèmes d’organisation avant destruction définitive, dans un milieu naturel dont nous savons qu’il correspondait à l’un des choix d’im- plantation des premiers agriculteurs. Les vestiges du Néolithique (entre 4900 et 3500 av. n. ère) et du Bronze final moyen (1300-1150 av. n. ère) étaient, comme souvent dans la région, mal conservés. Ce type de site, érodé jusqu’au-dessous de l’ancien sol de circulation, ne recèle que des traces rares et dispersées auxquelles nous réussissons à donner du sens par comparaison entre elles, sur le site, et avec des vestiges semblables, sur d’autres sites. Un inventaire détaillé, similaire à celui élaboré († C. Pommepuy) en vallée de l’Aisne dans les mêmes années sur le

RkJQdWJsaXNoZXIy MTEzNjkz