Extrait Archéologia

ARCHÉOLOGIA N° 604 / 57 Portrait d’Agrippine la Jeune, dite Messaline. Florence, Galeries des Offices, Galerie des Statues et des Peintures. Mais, dès la fin de la République, les condi‑ tions de vie des femmes de l’élite se modifient, à mesure qu’elles commencent à bénéficier d’une éducation raffinée et d’une certaine indépendance d’action, favorisée par la pos‑ session d’un patrimoine conséquent. Dans ce contexte, le régime dynastique mis en place par Auguste demande aux membres de la famille impériale de réactualiser le modèle républicain, en combinant les idéaux tradi‑ tionnels avec les nouvelles possibilités de la vie féminine, et de jouer un rôle public en tant que représentants de la maison du seigneur de Rome. Sous le règne d’Auguste, Livie, son épouse, ou Antonia la Jeune, fille d’Octavie la Jeune et de Marc Antoine, surent parfaite‑ ment incarner ce nouveau modèle. Explorant tous les aspects de la représen‑ tation des femmes dans le monde romain, l’exposition présente tout d’abord le modèle idéal, celui que tout le monde connaît, de la matrona , la dame de la maison qui s’accom‑ plit dans son rôle d’épouse puis de mère, idéal qui se perpétue de génération en géné‑ ration et s’applique à toutes quelles que soient leurs classes sociales. Les contre- exemples existent aussi avec celles dont la conduite défie d’une manière ou d’une autre cet état de fait. L’évolution poli‑ tique que connaît l’Empire au tournant de notre ère change toutefois la donne : les femmes de la maison impériale, la domus Augusta , occupent désormais un rôle public formellement reconnu grâce à l’accès aux statuts d’ Augusta de leur vivant, puis de Diva à leur mort. Ces changements inspirent les dames de l’élite qui investissent dès lors des espaces d’action publique en tant que prêtresses du culte impérial et des impératrices divinisées ( flaminicae ) ou pro‑ tectrices de leurs concitoyens ou de leur ville ( patronae ). Le modèle qui ne change jamais… mais qui finit par changer La femme idéale est représentée à Rome, à partir de l’époque royale, par la matrona . Son modèle est Lucrèce, dont l’histoire, qui s’est déroulée au VI e siècle avant notre ère, est encore racontée sous le règne d’Auguste par Tite-Live. Elle est domiseda , ayant dans la domus , la maison, son espace de référence ; elle est lanifica , c’est-à-dire dédiée au filage et au tissage de la laine ; elle est surtout pudica , fidèle et discrète. Et c’est précisément la défense de ses vertus (rappelons qu’elle fut l’épouse de Tarquin Collatin, homme fort et proche du roi Tarquin, mais que, violée par le fils de ce dernier, elle se donna la mort) qui provoqua, selon la tradition, en 509 avant notre ère, la fin de la monarchie, avec l’expul‑ sion de Tarquin le Superbe, et la naissance de la République, ce régime politique neuf trou‑ vant en elle son idéal féminin de référence.

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