Extrait Archéologia

ARCHÉOLOGIA N° 597 / 61 L’art de la fortification égyptienne est sou- vent passé sous silence. Non que le matériel documentaire fasse défaut : il existe quantité de rapports et d’études sur les vestiges de forteresses. Mais pour diverses raisons, cet aspect est peu développé et exceptionnels sont les ouvrages qui rendent justice aux architectes égyptiens dans ce domaine. Il est vrai que les témoignages archéologiques sont rares et pour peu qu’ils aient échappé à la destruction, leurs maigres ruines ne rendent nul compte de l’aspect monumental initial des grandes citadelles. Dans les années 1960 et 1970, l’achèvement du grand barrage d’Assouan a provoqué la disparition de la plupart des sites fortifiés nubiens du Moyen Empire (2033-1786 avant notre ère) sous les eaux du lac Nasser. Le développement du delta oriental, par l’irrigation et la mise en culture de zones arides, menace aujourd’hui de disparition les vestiges de cette région. Fort heureusement, les nombreux rap- ports de fouilles rendent possibles diverses reconstitutions qui illustrent les fantas- tiques innovations effectuées par les anciens Égyptiens dans ce domaine : tours, bastions, barbacanes, remparts, glacis, meurtrières et ponts coulissants. La sophis- tication des appareils défensifs égyptiens, en particulier au Moyen Empire, donne à entendre le caractère redoutable des tech- niques d’assaut dont il fallait alors se pré- munir. Il y eut de tout temps entre ces deux arts – la fortification et la poliorcétique – un développement interactif, offrant un véritable chassé-croisé d’innovations dont la perpétuelle finalité pour l’un était de prendre l’avantage sur l’autre. Les témoi- gnages iconographiques montrent en effet que, parallèlement à l’art de la défense, celui du siège a aussi bénéficié d’une atten- tion toute particulière. Entrée orientale du temple de Médinet Habou. L’admiration suscitée par l’architecture égyptienne se cantonne aux constructions religieuses et funéraires, voire à la statuaire, et il semble convenu que le pays des pharaons attachait une moindre importance à l’élaboration de ses défenses. La plupart des traités de fortifications actuels ne s’intéressent qu’aux Romains, voire aux Grecs, alors qu’on lit aussi ici et là que les premiers engins de siège seraient l’œuvre des Assyriens. Il n’en est rien et cet article rétablit les faits. Par Franck Monnier , ingénieur et chercheur associé au CNRS, UMR 7041 L’art DE LA fortification UN ASPECT MÉCONNU DU GÉNIE ARCHITECTURAL ÉGYPTIEN Découverte

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