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MÔMOS, LE DIVIN BOUFFON Dans la mythologie grecque, Mômos est le dieu et la per- sonnification de la Raillerie , de la Moquerie, du Sarcasme, du Blâme, du Reproche et de la Critique acerbe (tels sont les sens, en grec ancien, du mot mômos ). Ce dieu est men- tionné, au VII e siècle avant J.-C., par le poète grec Hésiode, qui le présente comme le fils de Nyx (la Nuit). Divinité très secondaire, Mômos n’intervient que dans quelques rares récits et légendes de l’Antiquité. Selon une tradition, Mômos aurait été le bouffon des dieux de l’Olympe – c’est- à-dire des principales divinités grecques, installées au sommet du mont Olympe –, qui finalement, lassés de ses moque- ries et de ses reproches continuels, l’au- raient chassé ; Mômos serait alors allé rejoindre le cortège de Dionysos (le dieu du Vin et de l’Ivresse), qui était le seul à supporter ses plaisanteries et ses sar- casmes. Une autre légende rapporte qu’un jour Athéna (la déesse de la Sagesse), Poséi- don (le dieu de la Mer et des Tremble- ments de terre) et Hephaïstos (le dieu du Feu et des Volcans) organisèrent entre eux un concours d’inventions – une sorte de concours Lépine avant l’heure. Pour l’occasion, Athéna imagina la première maison, Poséidon créa le premier taureau et Hephaïstos le pre- mier humain. Ils allèrent ensuite trouver Mômos, qu’ils avaient choisi pour juge, et lui demandèrent de désigner la meil- leure invention, et donc le gagnant du concours. Mômos examina les trois œuvres, et aucune ne lui sembla satis- faisante : il reprocha à Athéna de n’avoir pas prévu une maison transportable ; il blâma Poséidon d’avoir placé les cornes du taureau de chaque côté de la tête de l’animal plutôt qu’au milieu du front, où elles auraient été plus efficaces ; et enfin il déplora qu’Hephaïstos n’eut pas pensé à installer sur la poitrine de l’homme une petite fenêtre permettant de connaître ses désirs et ses pensées. L’es- prit critique de Mômos étant impi- toyable, il n’y eut à ce concours aucun gagnant, mais trois perdants… Cette légende a été évoquée au II e siècle après J.-C. par Lucien de Samosate, un écrivain grec qui, par ail- leurs, a mis en scène Mômos dans un texte satirique intitulé l’Assemblée des dieux . Lors de cette Assemblée , qui est présidée par Zeus, le roi des dieux, Mômos prend la parole, et annonce d’abord qu’il va parler avec franchise, comme il en a l’ha- bitude : « je dis net ce que j’ai sur le cœur : ni crainte ni honte ne me fait déguiser ma pensée. Aussi bon nombre de gens me regardent-ils comme un être insupportable, d’un naturel hargneux » . 13 Le Bouffon du roi , collage de Solange Gautier, 2019. © Collection Solange GAUTIER/KHARBINE-TAPABOR. Le dieu Mômos (imaginé par un illustrateur du XIX e siècle) W © Florilegius/Leemage

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