Extrait Dossiers d'Archéologie

É difié par Thoutmosis III (environ 1479-1424), hors les murs de Karnak, le temple ne fut intégré que tardivement au domaine d’Amon-Rê, à l’occasion de la construction de la grande enceinte de Nectanébo I er (380-362). Il connut plusieurs étapes de construction, qui ont à chaque fois profondément remodelé l’espace de culte et son environnement immédiat. Dans le cadre d’un vaste projet d’aménagement du sec- teur nord de Karnak, Chabaka (XXV e dynastie, 722- 707) élève deux portes associées à des enceintes massives en brique crue, qui agrandissent ainsi le téménos du dieu ; au sud du temple, deux autres portes délimitent un accès vers un nouveau bâti- ment à vocation économique et religieuse, le Tré- sor de Chabaka. Les aménagements ptolémaïques (kiosque, portes d’enceinte) vont se succéder à partir du règne de Ptolémée III Évergète I er (246- 222) ; la dernière enceinte est associée à une porte de Ptolémée VI Philométor (180-145). Enfin, sous le règne de Ptolémée XII Néos Dionysos (80-58, puis 55-51), une porte isolée est intégrée à l’axe princi- pal du temple. Les dernières inscriptions hiérogly- phiques sont datées de l’empereur romain Tibère. Les objectifs de la fouille étaient de circonscrire les diverses interventions ayant conduit à l’agran- dissement progressif du domaine du dieu. Le pro- gramme archéologique (2008-2018) a donc porté à la fois sur la délimitation des emprises successives des enceintes et sur l’identification des contraintes naturelles et historiques ayant transformé le pay- sage religieux et urbain au cours de l’évolution du monument. Il a ainsi été mis en évidence une séquence chronostratigraphique de l’occupation humaine dans ce secteur de la XI e dynastie (vers 2140-1990) jusqu’au IV e ou V e siècle de notre ère. Parallèlement à ces investigations archéologiques, des relevés épigraphiques, photographiques et architecturaux ont été menés, de même qu’une res- tauration complète du monument. AVANT LE TEMPLE DE THOUTMOSIS III À la suite des premières observations effectuées lors des fouilles des chapelles et de la cour du tem- ple (2010-2011), les travaux menés par Guillaume Charloux (2014-2016) sur les abords sud et est ont confirmé l’existence d’une structure antérieure en brique crue. Largement arasé lors du creusement de la fosse de fondation du temple thoutmoside, cet édifice a pu être daté d’entre la fin de la XVII e et le début de la XVIII e dynastie. Il fait écho à la stèle de fondation de Thoutmosis III, qui mentionne un édifice ancien en brique avec colonnes et portes en UN COMPLEXE CULTUEL EXCEPTIONNEL Sur la rive orientale du Nil, derrière de hauts murs de brique crue, le site de Karnak constitue l’ensemble monumental le plus imposant d’Égypte. L’édifice le plus important du complexe est le grand tem- ple d’Amon-Rê, forme solaire d’Amon devenu « roi des dieux » dans la région thébaine au Moyen Empire. Jusqu’à la fin de la civilisation égyptienne, Karnak reste le centre religieux de l’Empire et son clergé acquiert une puissance concurrençant le pouvoir de Pharaon. Depuis le début du XIX e siècle, le site archéologique n’a pas véri- tablement connu de répit, son sol suscitant les convoitises des voyageurs et des hommes au service des consuls européens puis la curiosité des égyptologues. Les travaux scientifiques opérés sous la direction de Georges Legrain, premier directeur des tra- vaux de Karnak (1895-1917), constituent une étape décisive, et depuis lors le domaine d’Amon-Rê a bénéficié d’une attention ininterrompue, à la mesure de cet ensemble monumental hors norme. Pour autant, ce territoire de près de 25 ha conserve encore des zones vierges de toute recherche ou qui méritent qu’y soit consacrée une attention soutenue. Sondage profond dans le temple de Ptah. © CNRS- CFEETK/G. Charloux bois. Le plan tripartite peut être comparé à celui du temple en pierre. Cette structure ancienne présente une orientation similaire à celle du grand temple d’Amon-Rê, alors qu’une rotation de quelques degrés dans le sens horaire a été opérée – pour une raison encore non expliquée – lors de la fondation du temple en pierre. Fort de ces premières observations, un son- dage profond en escalier a été pratiqué, qui a per- mis de révéler l’évolution du secteur avant la construction du temple de Ptah. C’est ainsi qu’une Vue générale des temples de Karnak. © CNRS-CFEETK/É. Saubestre

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